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LES BÉNÉDICTINES

Signalons encore un incident où l’abbaye montre quelle est la puissance de ses réclamations. À cette époque, les constructions du monastère ne s’étendaient ni jusqu’à la rue Saint-Pierre, ni jusqu’à la place des Terreaux. Sur la partie méridionale de cette place, le couvent était limité par la rue des Escloisons, ainsi nommée parce que le canal du Rhône à la Saône, passant par là, contenait des écluses ; elle prit plus tard le nom de rue Lafont, d’un échevin de la ville qui, en 1690, dans un moment de disette, rendit les plus grands services. Vers la rue Saint-Pierre étaient des jardins. La place de Saint-Pierre avait été longtemps un cimetière, et c’est dans ce cimetière que pour la première fois furent chantés les psaumes de Clément Marot ; ce cimetière fut converti en place, et sur cette place se tenait un marché, source de revenus pour le couvent. Le Consulat voulut transférer ce marché sur la place des Terreaux, mais il avait compté sans les religieuses, qui réclamèrent vivement le rétablissement du marché sur la place Saint-Pierre, et le Consulat céda.

En 1562, quand le baron des Adrets se rendit maître de la ville, il s’empara de l’abbaye, dont il fit son quartier général, en chassa toutes les religieuses, et ses bandes saccagèrent ou brûlèrent tous les titres, papiers, meubles, ornements, châsses, reliquaires d’argent et reliques précieuses. Ce qui fut sauvé de ce pillage de vandales le fut par une sœur converse, qui feignit d’aller cueillir des simples dans les jardins du monastère et qui trouva là et emporta des reliques dispersées et profanées ; elle les rendit plus tard à l’abbaye.

Car les religieuses et l’abbesse, parente d’un chef huguenot, parvinrent à s’enfuir et à se retirer à Morancé, un de leurs prieurés, près d’Anse. Au rétablissement de la paix, au commencement d’août 1563, elles revinrent à Saint-Pierre, mais elles n’y trouvèrent que des murs à moitié détruits. Le couvent fut relevé, il reprit bientôt son ancien éclat, et fut érigé en abbaye royale. À peine relevé, le monastère fut envahi par un autre fléau ; la peste, qui fut particulièrement rigoureuse à Saint-Pierre. Les religieuses furent obligées de se disperser, et l’abbesse se retira dans son prieuré de Morancé.