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LES ANCIENS COUVENTS DE LYON

La Rebeyne se termina par le supplice des principaux émeutiers, mais la misère du peuple ne fit que s’accroître, et, en 1531, la ville de Lyon était la victime d’une horrible famine. Non seulement les habitants de la cité manquaient de blé, mais les étrangers venaient et par terre et par eau, dans un état si désolant que c’étaient, dit Paradin, « pures anatomies vivantes ». Mais, dans cette détresse, la charité réunit tous les cœurs ; plusieurs fois des conseillers de ville s’assemblèrent aux Cordeliers et établirent des commissaires pour recueillir et répartir les souscriptions versées entre leurs mains. Prêtres, réguliers, laïques, tous y concoururent. Les pauvres étrangers furent abrités sous des cabanes construites à cet effet dans le pré d’Ainay ; les pauvres de Lyon eurent des asiles ouverts dans sept quartiers différents. Ces préparatifs rapidement terminés, on annonça à son de trompe que tous les pauvres eussent à se rendre au couvent de Saint-Bonaventure le lendemain matin, 19 mai 1531. Il s’y trouva de sept à huit mille personnes à qui on distribua les provisions préparées à l’avance, et une contremarque qui assignait à chacun tel ou tel quartier. Jusqu’au 9 juillet, c’est-à-dire pendant cinquante-deux jours, cinq mille cinquante-six personnes furent ainsi nourries. À ce moment, la diminution du prix du blé et la moisson prochaine permirent à tous de revenir à leurs anciennes habitudes.

Mais de cette famine naquit une œuvre puissante, où se révèle plus encore la charité lyonnaise. Le 18 janvier suivant, les comptes de la famine furent soumis aux autorités assemblées aux Cordeliers. Il y avait un reliquat de recettes de trois cent quatre-vingt-seize livres tournois, environ deux mille cinq cents francs[1]. C’est sur ce fonds, sur ce rien qu’opéra l’industrieuse charité de nos pères. Un des commissaires de l’aumône, Jean Broquin, proposa d’élever, au moyen de dons volontaires, un établissement qui pût subvenir à l’indigence des pauvres. On s’ajourna au dimanche suivant, et le

  1. Potton, Lyon ancien et moderne, dit 296 livres, 2 sous, 7 deniers.
    L’Almanach de Lyon, (1789) dit 396 livrés, 2 sous, 7 deniers ; celui de 1755, 360 livres.