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TYBERT ET LES DEUX PROUVÈRES.

gis prenoit un peu d’avance, le bon Rufrangier approche de la croix et lève les mains ; mais, son palefroi n’étant pas assez haut, il ne put atteindre la proie : il se décide alors à monter droit sur la selle, bien persuadé qu’il n’auroit plus qu’à saisir ; mais Tybert dresse les poils, lui jette les ongles sur le visage, fait un saut, le déchire à belles dents, si bien que Rufrangier se détourne au plus vite et tombe à la renverse au pied de son cheval. Pendant que la douleur de la chûte et les morsures du chat lui ôtent sa présence d’esprit, Tybert descend sur les arçons que le prouvère venoit de quitter ; le cheval effrayé s’enfuit bride abattue, arrive à travers champs à la maison, et penètre dans la cour au moment où la femme du prouvère se baissoit pour ramasser du petit bois. Elle ne voit pas le cheval qui, poussé de grande violence, vient la frapper en pleine poitrine. « Au secours ! au voleur ! au diable d’enfer ! » Car tel lui sembla Tybert, accroupi sur la selle ; mais Tybert connoissoit la maison, et quand le cheval s’élança vers l’écurie, il fit un saut, et le plus tranquillement du monde, il alla tenter une reconnoissance dans les combles du logis.

Cependant Rufrangier revenoit à lui. Il appelle Turgis, et le prie de lui amener son palefroi. Turgis arrive : « Ah ! messire, êtes-vous