Page:Les aventures de maître Renart et d'Ysengrin son compère, trad. Paulin, 1861.djvu/224

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
208
TRENTE-SIXIÈME AVENTURE.

Renart se lève en pieds à son tenir, replie la queue de son manteau, se drappe et fièrement se met en mesure de prêter le serment qu’on lui demande. Mais, en fait de ruses et d’aguets appensés, Renart ne connoissoit pas de maîtres : Il s’apperçut donc que les pas étoient gardés ; il devina que Rooniaus étoit encore du monde, au battement de ses flancs et à sa reprise d’haleine. Le mouvement qu’il fit alors en arrière n’ayant pas échappé à l’œil de Brichemer : « Eh ! qu’est-ce, Renart ? » lui dit-il, « hésiteriez-vous ? il ne s’agit que de mettre votre main droite sur la dent de saint Rooniaus. — « Sire, » répond Renart, « je sais qu’à tort ou à droit je suis tenu d’exécuter l’ordonnance ; cependant, je crois voir une chose que vous ne soupçonnez pas et dont je dois vous avertir. — Non, non, » répond Brichemer, « je ne reçois pas votre excuse, il faut jurer, ou vous resigner aux condamnations que nous allons prononcer contre vous. »

Par bonheur, damp Grimbert le blaireau avoit également découvert la trahison : mais ne voulant pas s’exposer à la haine de tant de puissans personnages, il s’avisa d’un adroit expédient. « Seigneur, » dit-il, « la raison veut au moins que Renart n’ait pas à se défendre de la presse, et qu’on ne laisse pas écraser un