Page:Les aventures de maître Renart et d'Ysengrin son compère, trad. Paulin, 1861.djvu/240

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l’Assemblée, quand entrèrent les dolentes et Chantecler battant violemment ses paumes. Pinte eut la force de parler la première : « Ah ! pour Dieu, mes seigneurs, chiens et loups, nobles et gentilles bêtes, ne repoussez pas d’innocentes victimes. Maudite l’heure de notre naissance ! ô mort, viens nous saisir, avant que nous tombions sous la dent cruelle de Renart ! J’avois cinq frères de père, Renart les a tous dévorés. J’avois quatre sœurs de mère, les unes de l’âge le plus tendre, les autres, déjà gelines d’une beauté accomplie, Gombert du Fresne les engraissoit pour la ponte des œufs de choix ; soins inutiles, Renart de toute n’en épargna qu’une seule, les autres passèrent par son gosier. Et vous, ma douce Cope, couchée dans cette biere, chère et malheureuse amie, qui pourra dire combien vous étiez grasse et tendre ! Et que deviendra votre sœur dolente et éplorée ! Ah Renart ! puisse le feu d’enfer te dévorer ! Combien de fois nous as-tu chassées, effrayées, dispersées ? combien de robes nous as-tu déchirées ? combien de fois as-tu franchi de nuit notre enceinte ? Ce fut hier, près de la porte, que tu laissas ma sœur étendue, sans vie. Tu pris la fuite, en entendant les pas de Gombert, qui par malheur n’eut pas un cheval assez rapide pour te fermer la retraite.