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RENART ET PINÇART LE HÉRON.

confiance fut cause de sa perte : car Renart en va profiter pour tenter le coup décisif. Il fait un troisième radeau et s’y ménage une sorte de lit dans lequel il pourra se cacher aisément, car la fougère est précisément de la couleur de sa pelisse. Il hésite pourtant avant d’y entrer ; le terrain n’est peut-être pas assez solide : mais enfin il prend son parti, se met à flot en même temps que son frêle bâtiment, et se voit porté tout près du pêcheur au long bec. Pinçart ne s’en préoccupe pas : « À d’autres ! » dit-il, « je ne m’effraie pas pour quelques brins de fougère. » Et bientôt Renart, profitant du moment où le bec et la tête de l’oiseau étoient plongés dans l’eau, jette sur lui la dent, le saisit par le cou, lui redresse la tête, saute à terre et le traîne sous le buisson le plus voisin. Pinçart crioit de toutes ses forces ; mais l’autre n’etoit pas de ceux que les plaintes attendrissent ; il le place sous ses pieds et lui donne ainsi le coup de grace. Sitôt étranglé sitôt mangé, pour ainsi dire.