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NOUVELLE ÉTUDE

textes de Renart, et les dissertations dont ces textes ont été l’occasion.

On sait que le genre de fiction, qui consiste à prêter aux animaux les passions et le langage des hommes, remonte au premier âge de toutes les littératures. L’Apologue est hébreu, egyptien, indien, grec, françois : il appartient à tout le monde. Dans l’Apologue, et surtout dans celui de nos contrées, on voit figurer au premier rang le Loup, emblème de la violence et de la voracité, le Goupil (vulpes), emblème de la ruse et de la malice. Il n’y a pas d’enfant qui n’ait eu peur du loup, pas un qui n’ait pris un certain intérêt aux méchans tours du Renard. Tous savent par cœur comment maître Corbeau perdit son fromage. Avant La Fontaine on empruntoit ces récits aux Ysopets du moyen âge ; avant les Ysopets à Phedre ; avant Phedre à Ésope. Notre horison littéraire ne va guère au delà.

Dès le jour où Rome cessa d’imposer sa langue à l’Europe, et quand surgirent de tous les côtés de nouveaux idiomes avides d’entrer au partage de la riche proie des lettres latines, on vit reparoître le fond des plus anciens apologues, sous une forme plus ou moins altérée. Et comme il y eut toujours dans les Gaules et dans une partie de la Germanie un enseignement et des écoles, les fables æsopiques furent un des premiers, des plus faciles et des plus agréables exercices des maîtres qui enseignoient, et des écoliers qui apprenoient les secrets de la langue dite grammaticale, à l’exclusion de toutes les autres. Ces exercices, on le pense bien, ne se bornoient pas à réduire les an-