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NOUVELLE ÉTUDE

en choisissant de tels noms (Richildis et Hermesendis), nos trouvères n’ont voulu qu’indiquer le rôle assigné dans leurs vers aux épouses de leur Renart et de leur Ysengrin.


Dame Hersent resenifie
La leuve qui si est haïe.
Qui si par est aigre d’embler
Bien puet à Hersent ressembler.
Moult furent tous les deux d’un cuer,
L’une fu l’autre, ce cuis, suer….
Por le gran engien et por l’art
Ert la gorpille Richeut dite ;
Se l’une est chate, l’autre est mite.…

(V. 129.)

Les noms des autres animaux introduits dans Renart ou sont empruntés aux hommes, ou rappellent l’apparence, le caractère, la démarche ou la voix de ceux auxquels on les donne. Il n’y eut, dans le choix qu’on en fit, aucun système, aucun parti pris à l’avance ; comme il n’y en a pas dans celui que font de leurs personnages nos auteurs de comédies. Les premiers furent de pure fantaisie, ou le reflet d’une impression passagère : l’usage des sobriquets parmi les hommes étant aussi ancien que la société même, il a pu suffire qu’au temps de nos poëtes, des individus du nom de Theodebert ou Thibert, Grimbert, Bernard, Hubert, Wanemer, Brichemer, Thiecelin, Drouin, aient été surnommés le Chat, le Blaireau, l’Âne, l’Escoufle, le Porc, le Cerf, le Corbeau, le Moineau, pour que les auteurs de Renart aient retourné les surnoms en faveur des animaux qu’ils mettoient en scène. Ce ne fut plus l’archiprêtre Bernart qui fut appelé l’âne ; ce fut l’âne qui de-