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TROISIÈME AVENTURE.

Il faut le dire ici, à l’éloge de damp Renart, quand il entendit le vilain prier et pleurer pour avoir voulu défendre son coq, il se sentit ému d’une douce pitié. « Allons ; vilain », lui dit-il, « tais-toi, ne pleure plus. Cette fois on pourra te pardonner ; mais que jamais tu n’y reviennes, car alors je ne veux revoir ni ma femme ni mes enfans si tu échappes à ma justice. Avant de retirer ta main et ton pied, tu vas prendre l’engagement de ne rien faire jamais contre moi. Puis, aussitôt lâché, tu feras acte d’hommage et mettras en abandon tout ce que tu possèdes. — Je m’y accorde de grand cœur, » dit le vilain, « et le Saint-Esprit me soit garant que je serai trouvé loyal en toute occasion. » Berton parloit sincèrement ; car au fond, malgré son avarice, il étoit prud’homme ; on pouvoit croire en lui comme en un prêtre. « J’ai, » lui dit Renart, « confiance en toi ; je sais que tu as renom de prudhommie. » Il lui rend alors la liberté, et le premier usage que Berton en fait, c’est de se jeter aux genoux de Renart, d’arroser sa pelisse de ses larmes, d’étendre la main délivrée vers le moutier le plus voisin, en prononçant le serment de l’hommage dans la forme accoutumée.

« Maintenant, » dit Renart, « et avant tout,