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XLVIII.



Eco piteuse Eco que les perfections
D'une rare beauté rendirent mal-heureuse :
Qui trop cruellement en la loy amoureuse,
As gemy sous le fais de mille afflictions.

Combien qu'en escoutant mes lamentations,
Tu te cache à mes yeux de mon mal-heur honteuse,
Parmy la sombre horreur d'une montagne creuse,
Redoublant mes accens tu plains mes passions.

Si je pleure mon dueil en larmes tu te baignes,
Si je plains mon mal-heur mes cris tu accompagnes,
Resonnant de Narcis la jeune cruauté :

Pource qu'un mesme feu s'est nourry dans noz veines,
Esgallé est nostre amour, & esgalles noz peines,
Estans tous deux vaincus d'une esgalle beauté.


XLIX.



Ce fut un Vendredi que j'apperceu les Dieux,
Verser sur les mortels d'une ballance esgalle,
Et le bien & le mal, lors que leur main fatalle :
Esclave m'attacha au joug de deux beaux yeux.

J'errois aux borts de Seine, & contemplois aux Cieux,
Des courciers de Phœbé la carriere journalle,
Quand Amour plein de fiel parmy l'air se devalle,
Et vint picquer mon cueur sainctement furieux.

O jour trois fois heureux, ou la divine essence,
Des on precieux sang lava l'antique offence
De mes premiers ayeuls : ô douce cruauté,

O bien-heureuse erreur, & plus heureuse encore
Seine ou premier j'ay veu la Nymphe en qui j'adore,
La chasteté, l'amour, l'honneur, & la beauté.