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LXII.



O vive & sainte flame, ô mes soupirs ardans,
O miserable dueil, ô folle outrecuidance,
O pensers denuez de leur longue esperance,
O traits qui dans mon cueur devenez plus cuisans :

O divines beautez sources de mes tourmens,
O beaux desirs vainqueurs de ma jeune constance,
O bel astre ascendant de ma triste naissance,
O sœurs qui devidez le fillet de mes ans :

O fleuvez, ô forests, ô desers, ô fontaines,
O beaux lieux ou jadis je soulagay mes peines,
O Mirthes, ô Lauriers, ô gracieux appas :

O Manes qui errez parmy l'ombre eternelle,
Si quelque souvenir reste apres le trespas,
Au moins prenez pitié de ma douleur cruelle.


LXIII.



O bien-heureux bessons que le grand œil du monde,
Delaissant le Taureau visite en ce beau moys :
Heureux & plus qu'heureux, & trois & quatre fois,
Beaux astres adorez sur la Terre & sur l'onde.

Or que par vostre aspect la Terre se fait blonde
Sous les espics crestez, & ore que les voix
De mille & mille oiseaux font retentir les bois,
Et que nature en tout se monstre plus feconde.

Si vous avez pouvoir d'eschauffer par dehors
Faites tant que voz rets penetrent dans les corps,
Influant sur les cueurs une amitié jumelle :

Vous n'estes dans le Ciel que pour avoir aymé,
Helas rendez le cueur de madame animé,
Nous muant comme vous en planette immortelle.