Page:Les oeuvres poétiques de Clovis Hesteau de Nuysement 1578.pdf/90

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IIII.


Si comme l'Ascrean dessous la double Sime,
J'avois plongé ma soif dans la Pegaside eau :
O si le Delien infus en mon cerveau,
Polissoit mes escris d'une songneuse lime.

Si j'estois du trouppeau dont on fait plus d'estime,
Je peindrois ton renom si parfait & si beau,
Que l'unique labeur du Mausolé tombeau,
N'esgalleroit en rien la beauté de ma rime.

J'escrirois tes beautez compagnes d'un sçavoir :
Je dirois les vertus qui te font apparoir,
(Comme un lis sur les fleurs) l'ornement de cet âge.

Mais n'estant agitè de si grave fureur,
Ains lentement esmeu d'une Pannique erreur,
Jappen à ton autel ce mien petit ouvrage.


V.


Amour pour se venger de ma rebelle audace,
Et punir en un jour mille crimes commis :
Reprit son arc douté, & ses traits ennemys,
Espiant de ma mort & le poinct, & la place.

Ma force s'estoit jointe à mon cueur ceint de glace,
Pour defendre mes yeux à la sienne sousmis :
Lors que le coup mortel jusqu'en l'ame transmis,
Grava dessus mon cueur les beaux traits de ta face.

Qui çà qui là dans moy la force & la raison,
Esperdument erroient yvres de sa poison :
Et sans me secourir s'efforçoient au contraire.

Ainsi mon cueur d'aimant s'amolit tout d'un coup,
Ma force & ma raison s'attacherent au joug,
Idolâtres du Dieu qui m'est plus adversaire.