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Voyages Aduentureux

Faria, qui demeura confus vn aſſez long temps, ſe voyant priué tout à fait de l’eſperance de racheter ſes priſonniers ; de maniere qu’apres qu’ils eurent tous bien examiné ces inſolentes paroles cõtenues dans la lettre du Mandarin, & ſa grande diſcourtoiſie, ils conclurent en fin qu’il falloit mettre pied à terre & attaquer la ville, ſur l’eſperãce que Dieu les aſſiſteroit, puiſque leurs intentions eſtoient bonnes. Pour cet effet ils ordonnerent incontinent des vaiſſeaux pour gaigner la terre qui furent quatre grandes barques de peſcheurs qu’ils auoient priſes la nuit paſſée. Sur quoy faiſant le denombrement des gens qu’il y pouuoit auoir pour cette entrepriſe, il y en fut trouué trois cens, dont il y en auoit quarãte Portugais de nation. Pour les autres ils eſtoient eſclaues & mariniers, ſans y comprendre les hommes de Quiay Panjan, dont il y auoit cent ſoixante harquebuſiers, & les autres eſtoient armés de pieux & de lances, & auoient auec cela des bombes à feu, & autres telles choſes neceſſaires pour l’effet de leur entrepriſe.




Comme Antonio de Faria attaqua la ville de Nouday, & de ce qui luy arriua.


Chapitre LXV.



Le lendemain matin vn peu deuant qu’il fuſt iour, Antonio de Faria fiſt voile à mont la riuiere auec trois Iuncos, ſans y comprendre la Lorche & les quatre barques qu’il auoit priſes. En cét equipage il s’en alla ancrer à ſix braſſes & demie de fonds, tout aupres des murailles de la ville, puis faiſant plier les voiles ſans bruit, ny ſans aucune ſalue d’artillerie, il deſploya la banniere de marchandiſe à la façon des Chinois, afin que par cette apparence de paix il ne reſtaſt aucun cõpliment à faire, quoy qu’il ſceut bien que tout cela ne ſeruiroit de rien enuers le Mandarin. Cela fait, de ce meſme lieu où ils eſtoient à l’ancre, il luy enuoya vn autre meſſager, ſans faire ſemblant qu’il euſt receu aucun mauuais traittement de ſa part. Par ce