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de Fernand Mendez Pinto.




De noſtre arriuée en la ville de Sempitay, & de ce qui ſe paſſa entre nous & une femme Chreſtienne que nous y rencontraſmes.


Chapitre XCI.



De ce carrefour que i’ay dit, nous continuaſmes noſtre voyage encore onze iours à mont la riuiere, qui en cet endroit eſt deſia ſi peuplée de citez, villes, villages, bourgs, fortereſſes & chaſteaux, qu’en pluſieurs lieux des vns aux autres il n’y a pas plus de diſtãce que de la portée dvne harquebuze, & ainſi tout autant de terre que nous pouuions deſcouurir eſtoit pleine de maiſons de plaiſance, & de temples dont les clochers eſtoiẽt tous dorez ; ce qui parût vne choſe grandement magnifique à nos yeux, & dont nous demeuraſmes tous eſtonnez. De cette façon nous arriuaſmes à vne ville nommée Sempitay, & y demeuraſmes cinq iours, à cauſe que la femme du Chifuu qui nous conduiſoit ſe trouuoit mal. Là nous priſmes terre auec ſa permiſſion, & ainſi enchaiſnez comme nous eſtions, nous nous en allaſmes le long des ruës demandant l’aumoſne, que les habitans nous donnerent abondamment. Ceux-cy eſtonnez de voir des gens faits comme nous s’aſſembloient entr’eux par troupes, nous demandans qu’elle ſorte de gens nous eſtions, de quel Royaume, & comme s’appelloit noſtre pays ? A quoy nous reſpondions tous conformément à ce que nous auions dit pluſieurs fois, à ſçauoir que nous eſtions natifs du Royaume de Siam, que nous en allant de Liampoo à Nanquin la fortune nous auoit priuez de nos marchandiſes par vne tourmente ; & qu’au reſte encore qu’ils nous viſſent en ſi pauure équipage, nous ne laiſſions pas d’auoir eſté autresfois fort riches. Là-deſſus vne femme qui eſtoit accouruë comme les autres afin de nous voir, Il y a de l’apparence, dit-elle, en regardant tous ceux d’alentour, que les choſes que les pauures eſtrangers nous