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Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/308

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plus vieille mit ses doigts dans sa bouche et siffla trois fois, puis elle cria : « Abricots, pêches, pavies, brugnons, cerises, prunes, poires, bigarreaux, melons, muscats, pommes, oranges, citrons, groseilles, fraises, framboises, accourez à ma voix. — Mais, dit la reine, tout ce que vous venez d’appeler vient en différentes saisons. — Cela n’est pas ainsi dans nos vergers, dirent-elles, ; nous avons de tous les fruits qui sont sur la terre, toujours mûrs, toujours bons, et qui ne se gâtent jamais. »

« En même temps ils arrivèrent roulant, rampant, pêle-mêle, sans se gâter ni se salir ; de sorte que la reine, impatiente de satisfaire son envie, se jeta dessus et prit les premiers qui s’offrirent sous ses mains ; elle les dévora plutôt qu’elle ne les mangea.

« Après s’en être un peu rassasiée, elle pria les fées de la laisser aller aux espaliers, pour avoir le plaisir de les choisir de l’œil avant que de les cueillir. « Nous y consentons volontiers, dirent les trois fées, mais souviens-toi de la promesse que tu nous as faite, il ne te sera plus permis de t’en dédire. — Je suis persuadée, répliqua-t-elle, que l’on est si bien avec vous, et ce palais me semble si beau, que si je n’aimais pas chèrement le roi mon mari, je m’offrirais d’y demeurer aussi ; c’est pourquoi vous ne devez point craindre que je rétracte ma parole. » Les fées, très contentes, lui ouvrirent tous leurs jardins et tous leurs enclos ; elle y resta trois jours et trois nuits sans en vouloir sortir, tant elle les trouvait délicieux. Elle cueillit des fruits pour sa provision ; et comme ils ne se gâtent jamais, elle en fit charger quatre mille mulets qu’elle emmena. Les fées ajoutèrent à leurs fruits des corbeilles d’or, d’un travail exquis,