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à force d’aimer

nous nous marierons… Vous avez ma parole. Mais, vous entendez… » (sa voix devint en même temps plus basse et presque violente), « je ne tolérerai rien entre cet homme et vous !… Si vous le recevez, Hélène… si vous entrez dans des pourparlers quelconques avec lui… » (il s’arrêta, parut faire un effort pour retenir quelque parole brutale, puis ajouta dans un calme plus menaçant :) « vous serez responsable de ce qui pourra se passer. »

Hélène murmura seulement :

— « Oh ! mon ami… »

Et, dans l’ombre envahissant le berceau de feuillage sous lequel ils étaient assis, elle lui saisit une main, la lui étreignit avec reconnaissance.

Car de telles frayeurs avaient assailli son cœur dépourvu d’assurance qu’un moment elle avait craint que tout ne fût fini entre eux.

Un silence suivit. Le soir s’assombrissait. Sur les fleurs, l’eau, s’échappant de l’arrosoir qu’inclinait René, tombait avec un bruit doux. Des odeurs fraîches et mouillées montaient dans la tiédeur du crépuscule. La pâleur calme du ciel se troublait par instants du vol criard des hirondelles : c’était un tourbillon d’ailes et de voix stridentes, qui passait comme le vent, s’enfonçait dans l’espace, puis revenait suivant un grand cercle invariable. À la fin, elles se dispersèrent.

Tout à coup, à travers les lilas qui masquaient la grille, Hélène aperçut une silhouette à la dé-