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à force d’aimer

le fils auquel il devait son salut et celui de sa fille, était prêt à reconnaître René, ou, mieux encore, à l’adopter, — seul moyen légal de lui assurer, pour l’avenir, la moitié de sa succession ; et René Vallery deviendrait aussitôt le fiancé de Germaine de Percenay. Au fond, ce que le financier ne disait pas, ce dont Huguette ne se doutait guère, mais ce que le fils d’Hélène distinguait clairement, la peur tenaillait encore l’ancien directeur de la Compagnie du Tunnel. Il trouvait prudent de s’assurer le dévouement d’un gaillard comme ce petit Marinval, qui pourfendait avec tant de facilité les individus gênants. Il voulait l’arracher à l’Avenir social, à sa carrière d’apôtre et de réformateur, et, surtout, l’enlever à Fortier, accabler le chef socialiste sous le coup de cette défection.

Quels arguments irrésistibles n’avait-il pas, pour conquérir ce garçon de vingt-cinq ans, dont il connaissait l’enthousiaste amour ! Huguette, aveuglée par le rêve de réunir tous ceux qu’elle aimait, avait cru hâter le dénouement heureux en confiant à son père la sympathie réciproque de son frère et de Germaine. M. Vallery, triomphant, avait porté cette nouvelle au ministre.

— « Ta fille a du goût pour mon jeune Don Quichotte, » lui avait-il dit. « Si je fais de René mon fils légal, m’accorderas-tu pour lui la main de Germaine ? »