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LETTRE À M. ERNEST RENAN

Depuis ma lettre aux journaux de Rio de Janeiro, la presse de tous les pays s’était emparée de la nouvelle, qui avait fait son chemin comme l’œuf de la fable de La Fontaine, Les femmes et le secret, à tel point que le Journal des Débats de Paris, empruntant à un journal de Guayaquil la nouvelle de la trouvaille, disait qu’elle avait été faite au Pérou et que l’inscription existait, non pas sur une pierre cassée en quatre morceaux, mais sur une colonne. Il en résulta que, de tous côtés, d’Europe et d’Amérique, ce fut à mon adresse une pluie de demandes de renseignements au sujet de l’inscription. Personne ne s’imaginait que j’en avais grandement besoin moi-même, et que j’en demandais incessamment à tous et de toutes parts, ni que c’était pour en obtenir plus sûrement que je m’étais, fort à contre-cœur, adressé à la presse brésilienne.

Au milieu de ces désagréments et de ces luttes, je me demandais souvent à moi-même : Quel est le paléographe de ce pays ou y habitant, assez versé dans les langues sémitiques et surtout en phénicien, qui a eu la légèreté, l’impudence ou la sottise, si peu en harmonie avec son instruction, de se donner le travail de composer, au prix d’une énorme perte de temps, de laborieuses recherches et d’autres efforts intellectuels, une si longue inscription ? Si pareil exégète vit au Brésil ou s’y est trouvé de passage, quel a pu être son but en se don-