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LETTRE À M. ERNEST RENAN

et, sur cette singulière circonstance, la plus grande réserve. Une seconde réponse, que je provoquai, et que j’obtins du même personnage, vint confirmer la preuve fournie par la première.

Le doute ne m’était plus permis. L’évidence était là sous mes yeux, palpable, éloquente, indubitable !

Mais… qui expliquera cette bizarrerie de la nature humaine ?

Ah ! permettez moi de vous le dire, illustre et cher Maître, j’éprouvai à cet instant la même impression mélancolique et pour ainsi dire aigre-douce que l’on ressent lorsque, mal éveillé encore, on voit fuir les dernières images d’un songe délicieux et la pénombre du rêve faire place à la lumière du jour qui nous rappelle aux tristes réalités de la vie matérielle.

L’inscription phénicienne de la Parahyba était une inscription apocryphe.

Deux sentiments opposés se partageaient mon esprit ; je ressentais une sorte de plaisir, une joie de conscience à reconnaitre, à constater la fraude, et pourtant, d’un autre côté, j’étais envahi par un vif regret, par une indéfinissable tristesse en voyant se dissiper, comme un décevant mirage, toute la valeur de ce document qui me semblait jusqu’à ce moment, malgré mes doutes, le seul probable, l’unique admissible à tous les égards, pour rendre témoignage de la présence des grands navigateurs