Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/260

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
259
THUCYDIDE, LIV. IV.

la discrétion des Athéniens, sous la seule condition d’avoir la vie sauve. Nicias avait commencé par établir des intelligences avec les habitans : aussi fut-on plus tôt d’accord sur les articles du traité qui concernaient le présent et l’avenir. Les Athéniens exportèrent des Cythéréens, parce qu’ils étaient de Lacédémone et que l’île était trop voisine de la Laconie.

Après cette capitulation, les Athéniens, devenus maîtres de Scandie, place située sur le port, mirent garnison à Cythères, puis firent voile pour Asiné, Hélos, et la plupart des lieux maritimes, faisant des descentes, s’arrêtant en des lieux favorables aux campemens : ils ravagèrent le pays durant sept jours entiers.

Chap. 55. Les Lacédémoniens, voyant les Athéniens maîtres de Cythères, et s’attendant à de semblables descentes dans leur pays, ne se présentèrent nulle part avec toutes leurs forces contre eux ; ils se contentèrent d’envoyer des gros d’hoplites garder la campagne, dans les endroits où cette précaution était nécessaire. D’ailleurs ils se tenaient soigneusement sur leurs gardes : après les maux cruels et inattendus qu’ils avaient éprouvés à Sphactérie, après la perte de Pylos et de Cythères, et au milieu d’une guerre qui fondait sur eux à l’improviste et de tous les côtés à-la-fois, ils craignaient des séditions au sein de leur république. Contre leur usage, ils formèrent un corps de quatre cents hommes de cavalerie, et levèrent des archers. Ils se sentaient moins empressés que jamais à faire la guerre, surtout se voyant engagés, sans préparatifs convenables, dans une lutte sur mer, et encore contre des Athéniens, peuple qui croyait, à chaque entreprise qu’il négligeait, laisser échapper un succès. Des revers si nombreux, si rapprochés, si imprévus, les jetaient dans l’abattement : ils redoutaient quelque nouveau désastre semblable à celui de Sphactérie ; ils n’osaient plus, par cette raison, tenter le sort des armes. À la moindre démarche qu’ils hasardaient, ils pensaient qu’ils allaient faire une faute : leurs âmes irrésolues, n’ayant pas l’habitude du malheur, hésitaient à se rendre caution d’elles-mêmes.

Chap. 56. Les Athéniens cependant dévastaient la côte, sans que les garnisons voisines des lieux où ils opéraient leur descente tentassent contre eux le moindre mouvement, chacune en particulier se croyant inférieure en forces, et la terreur étant d’ailleurs presque universelle. Une seule qui osa se défendre vers Cortyte et Aphrodisia, fondit sur un corps de troupes légères qui se tenait dispersé, et le mit en fuite ; mais, reçue par les hoplites, elle se retira, et perdit quelques hommes, dont les armes restèrent au pouvoir des ennemis. Les Athéniens dressèrent un trophée et retournèrent à Cythères, d’où ils se portèrent, en tournant la côte, à Épidaure-Liméra. Ils ravagèrent une partie de la campagne, et arrivèrent à Thyrée, place dépendante de la contrée qu’on appelle Cynourie, et qui sépare l’Argolide de la Laconie. Les Lacédémoniens, à qui elle appartenait, l’avaient donnée aux Éginètes chassés de leur patrie, voulant par-là reconnaître les services qu’ils avaient reçus d’eux lors du tremblement de terre et de la révolte des Hilotes, et les récompenser de s’être toujours montrés, quoique sujets d’Athènes, zélés partisans de Sparte.

Chap. 57. À l’approche des Athéniens, les Éginètes abandonnèrent les fortifications qu’ils construisaient alors sur le bord de la mer, et se retirèrent dans la ville haute, qu’ils habitaient, et qui en était éloignée de dix stades environ. Une

17..