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THUCYDIDE, LIV. IV.

de Mendé, colonie des Érétriens dans la Pallène, suivit l’exempte de Scione. Brasidas n’hésita point à la recevoir, ne croyant pas commettre une injustice, quoiqu’elle se donnât ouvertement à lui pendant la trève : car il avait de son côté certaines infractions à reprocher aux Athéniens. Les Mendéens s’enhardirent en voyant l’affection de Brasidas pour eux, et surtout par l’exemple de Scione qu’il n’avait pas livrée. D’ailleurs ceux qui parmi eux intriguaient pour cette défection, étant peu nombreux, ayant suivi leur projet avec ardeur dès qu’ils s’y étaient déterminés, et craignant de le laisser éventer avant l’exécution, avaient, contre toute attente, forcé le peuple à embrasser leur parti. Les Athéniens, à cette nouvelle, bien plus irrités encore, se préparèrent à châtier les deux villes. Brasidas, informé de leur prochain embarquement, fit transporter secrètement à Olynthe, dans la Chalcidique, les femmes et les enfans de Mendé et de Scione, et envoya dans ces places cinq cents hoplites du Péloponnèse et trois cents peltastes de la Chalcidique, tous sous la conduite de Polydamidas. Ils s’attendaient à voir arriver incessamment les Athéniens ; ils accélérèrent en commun leurs dispositions.

Chap. 124. Vers le même temps, Brasidas et Perdiccas se réunirent pour aller une seconde fois combattre Arrhibée à Lyncus. L’un conduisait avec lui la portion des forces macédoniennes dont il disposait, et les hoplites des Hellènes établis dans ses états ; l’autre, les Chalcidiens, les Acanthiens, et le contingent de divers autres peuples, sans parler des troupes du Péloponnèse qui étaient restées à ses ordres : il n’y avait pas en tout plus de trois mille hoplites hellènes. Toute la cavalerie macédonienne suivait avec les Chalcidiens, au nombre d’un peu moins de mille hommes. Ils firent une invasion dans le pays d’Arrhibée, trouvèrent les Lyncestes campés et qui les attendaient, et campèrent eux-mêmes en leur présence. L’infanterie des deux armées se porta chacune sur une colline : une plaine les séparait ; la cavalerie y descendit. Il y eut d’abord un choc entre les deux partis. Les hoplites des Lyncestes descendirent eux-mêmes pour soutenir leur cavalerie ; ils s’avancèrent et offrirent le combat. Brasidas et Perdiccas marchèrent aussi au devant des ennemis, les joignirent et les mirent en fuite. Il en périt beaucoup ; le reste se réfugia sur les hauteurs, et se tint dans l’inaction. Les vainqueurs dressèrent un trophée, et restèrent deux ou trois jours à attendre les Illyriens qui devaient arriver et que Perdiccas avait pris à sa solde. Ce prince voulait, sans s’arrêter, aller attaquer les bourgades de la domination d’Arrhibée ; mais Brasidas était plus empressé de partir que de suivre ce projet, craignant que les Athéniens ne se portassent à Mendé avant son retour, et qu’il n’arrivât quelque malheur à cette place : d’ailleurs les Illyriens n’arrivaient pas.

Chap. 125. Pendant qu’ils étaient ainsi partagés d’opinion, on vint leur annoncer que les Illyriens, trahissant Perdiccas, s’étaient joints à Arrhibée. Alors les deux chefs se déclarèrent également pour la retraite, dans la crainte que leur inspirait ce peuple belliqueux : mais, comme ils étaient toujours peu d’accord, il n’y eut rien de déterminé sur le moment du départ. La nuit survint ; les Macédoniens et la foule des barbares furent saisis d’effroi, comme il arrive souvent aux grandes armées de se livrer à de folles terreurs. Se figurant que les ennemis s’avançaient plus nombreux qu’ils n’étaient en effet, et qu’à l’instant ils allaient paraître, ils s’enfuirent et prirent la route de leur pays. Perdiccas