Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/370

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
369
THUCYDIDE, LIV. VI.

ayant reçu de la cavalerie, se disposent à marcher contre eux. Persuadés que s’ils empêchaient l’ennemi de s’emparer d’Épipoles, lieu escarpé et qui domine la ville, ils le mettraient par-là dans l’impossibilité de les enfermer d’un mur de circonvallation, quand même une victoire l’aurait rendu maître de la campagne, ils résolurent de garder les accès d’Épipoles, les seuls qu’il pût tenter : car de tous les autres côtés sont des collines qui vont en pente jusqu’à la ville, en sorte que le terrain qu’elles enveloppent est en entier à découvert. Les Syracusains ont nommé ce lieu Épipoles parce qu’il domine le reste du pays. Avec le jour, ils allèrent, en masse, gagner la prairie que baigne l’Anapus. Hermocrate et ses collègues, récemment investis du commandement, firent la revue des hoplites, et choisirent parmi eux sept cents hommes que commandait Diomile, exilé d’Andros : ils garderaient Épipoles, et, réunis, ils seraient à portée de seconder avec promptitude toute autre opération.

Chap. 97. Dès le jour qui suivit cette nuit, les Athéniens firent la revue des troupes à l’insu des ennemis, sortirent de Catane par mer avec toutes leurs forces, abordèrent avec précaution dans un lieu nommé Léon, distant d’Épipoles de six ou sept stades, et mirent à terre leur infanterie, tandis que leur flotte allait stationner à Thapsos. Cette chersonèse avancée dans la mer, et ne tenant à la terre que par un isthme étroit, n’est, ni par terre ni par mer, fort éloignée de Syracuses. Les soldats de la flotte, après avoir garni l’isthme de palissades, restèrent dans Thapsos : quant à l’infanterie, elle courut précipitamment à Épipoles, et en gravit la hauteur du côté d’Euryèle, avant que ceux des Syracusains qui passaient en revue dans la prairie pussent s’apercevoir de sa marche et s’avancer contre elle. Ils vinrent cependant enfin avec plus ou moins de célérité, entre autres les six cents aux ordres de Diomile. Il n’y avait pas, de la prairie, moins de vingt-cinq stades à franchir pour se trouver en présence : ils attaquèrent donc en désordre, furent battus et rentrèrent dans la ville. Diomile fut tué, et avec lui périrent trois cents des siens environ. Les Athéniens dressèrent un trophée, rendirent par composition les morts aux Syracusains, et descendirent le lendemain jusqu’au pied de la place. Comme il ne se fit pas contre eux de sortie, ils se retirèrent et se mirent à construire, au sommet de la pente escarpée d’Épipoles, à Labdale, un fort qui regardait Mégares : ils le destinaient à servir de magasin pour leurs effets et leur argent, toutes les fois qu’ils s’écarteraient pour combattre ou travailler à des retranchemens.

Chap. 98. Peu après, il leur arriva d’Égeste trois cents cavaliers, et environ cent hommes, tant de chez les Sicules que de Naxos et autres lieux. Les deux cent cinquante cavaliers d’Athènes avaient reçu des chevaux de Catane et d’Égeste, ou en avaient acheté. On rassembla en tout six cent cinquante cavaliers. Les Athéniens laissèrent une garnison à Labdale, allèrent à Tycé, s’y arrêtèrent, et travaillèrent sans délai à un mur de circonvallation. La célérité de leurs travaux effraya les Syracusains ; ils ne crurent pas devoir rester tranquilles spectateurs, et s’avancèrent dans le dessein de combattre. Déjà l’on était en présence ; mais les généraux Syracusains, voyant leurs troupes éparses et considérant la difficulté de les ranger en bataille, retournèrent à la ville. Seulement ils laissèrent de la cavalerie, dont la présence empêchait les ennemis d’aller chercher des pierres et de s’écarter ;

24