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THUCYDIDE, LIV. VIII.

qui ne prenait part à l’expédition que pour remettre les vaisseaux à Astyochus, il traitait mollement l’affaire de la solde. On convint cependant qu’indépendamment des cinq vaisseaux [à qui l’on continuerait la drachme], on donnerait à chaque homme un peu plus de trois oboles : car Tissapherne paya pour les cinquante-cinq vaisseaux trente talens par mois, et l’on promit de payer au même taux tous les vaisseaux qui excéderaient ce nombre.

Chap. 30. Le même hiver, les Athéniens qui étaient à Samos reçurent d’Athènes un renfort de trente-cinq vaisseaux commandés par Charminus, Strombichide et Euctémon. Ils rassemblèrent tous ceux qui étaient devant Chio et d’autres encore, et résolurent d’assiéger Milet par mer, d’envoyer contre Chio une armée de terre et une flotte, et de tirer les commandans au sort ; ce qui fut exécuté. Strombichide, Onomaclès et Euctémon, à qui échut l’expédition de Chio, se dirigèrent sur cette île avec trente vaisseaux, embarquant sur des bâtimens destinés au transport des hoplites une partie des mille hoplites qui avaient été devant Milet. Les autres restant à Samos, dominateurs de la mer avec soixante-quatorze vaisseaux, se préparaient au siége de Milet.

Chap. 31. Astyochus, de son côté, qui se trouvait alors à Chio, se faisait remettre des otages, par crainte de trahison : mais il renonça à ces précautions quand il sut que la flotte conduite par [le Lacédémonien] Théramène allait arriver, et que les affaires des alliés se trouvaient en meilleur état. Il prit dix vaisseaux du Péloponnèse et autant de Chio, mit en mer, et, après avoir attaqué sans succès Ptéléum, navigua contre Clazomènes, où il ordonna aux partisans d’Athènes de se transporter à Daphnonte, à quelque distance de la mer, et d’embrasser le parti de Lacédémone. Les mêmes ordres étaient donnés par Tamos, hyparque d’Ionie. On n’obéit pas. Astyochus alors attaqua la ville, qui n’était pas murée : cependant, ne pouvant la soumettre, il remit en mer par un gros temps ; et tira du côté de Phocée et de Cume, tandis que le reste des vaisseaux alla mouiller dans les îles voisines de Clazomènes, Marathuse, Pélé, Drimysse. Retenus huit jours dans ces, îles par, les vents contraires, ils détruisirent et consommèrent en partie ce que les malheureux Clazoméniens y avaient déposé, embarquèrent le reste, et allèrent rejoindre Astyochus à Phocée et à Cume.

Chap. 32. Astyochus était dans ces parages, lorsqu’arrivèrent des députés lesbiens, voulant leur livrer Lesbos. Ils le persuadèrent : mais, comme les Corinthiens et les autres alliés ne montraient que de la répugnance pour une entreprise où déjà ils avaient échoué, il remit en mer pour Chio. Sa flotte fut battue de la tempête, et ses vaisseaux dispersés arrivèrent enfin de divers points. Pédarite s’y rendit bientôt après, en suivant les côtes : venu par terre de Milet, il s’était arrêté à Érythres, d’où, avec ses troupes, il avait traversé le bras de mer qui sépare Érythres de Chio. Il amenait aussi, des cinq vaisseaux de Chalcidée, des soldats au nombre d’environ cinq cents, que ce général avait laissés avec leurs armes. Sur l’avis que quelques Lesbiens songeaient à se soulever, Astyochus représenta à Pédarite et aux habitans de Chio qu’il fallait conduire une flotte à Lesbos et favoriser cette disposition : que ce serait augmenter le nombre des alliés, ou du moins faire du mal aux Athéniens, si l’on n’avait pas d’autres succès. Mais il ne fut pas écouté ; Pédarite dit même qu’il ne lui sacrifierait pas la flotte de Chio.