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ARRIEN, LIV. I.

qui au premier choc s’était jeté dans la ville, y met le feu et se retire chez Glaucias.

Chap. 2. Cependant quelques bannis rentrent dans Thèbes pendant la nuit ; rappelés par les partisans d’une révolution, ils surprennent hors de leurs postes, et dans une entière sécurité, Amyntas et Timolaüs, gouverneurs de la citadelle de Cadmus ; ils les égorgent, et, se rendant sur la place publique, ils invitent, au nom sacré de leur antique liberté, les Thébains à quitter le parti d’Alexandre, à briser le joug insupportable des Macédoniens. Ils ébranlèrent d’autant plus facilement la multitude, qu’ils ne cessaient d’affirmer qu’Alexandre avait péri chez les Illyriens. En effet, depuis long-temps on avait eu aucune de ses nouvelles, et celle de sa mort était l’objet de toutes les conversations, de tous les bruits ; de sorte qu’au milieu de cette incertitude, chacun, comme il arrive toujours, prenait son désir pour la réalité même.

Alexandre, instruit de ces événemens, estima qu’ils n’étaient rien moins qu’à négliger. La foi de la ville d’Athènes lui avait toujours été suspecte. Les Lacédémoniens, dont les esprits lui étaient depuis long-temps aliénés, d’autres villes du Péloponnèse, et les Étoliens naturellement inconstans, pouvaient grossir le parti des Thébains, dont l’audacieuse résolution deviendrait alors inquiétante ; il fait aussitôt franchir à son armée l’Éordée et l’Élymiotis, les rochers de Stymphée et de Parya ; le septième jour, il touche à Pellène, ville de Thessalie, la laisse derrière lui, et six jours après entre dans la Béotie.

Les Thébains n’apprirent la marche d’Alexandre que lorsqu’il parut avec toute son armée à Oncheste. Alors, même les auteurs de la défection, soutenaient que cette armée était envoyée de Macédoine par Antipater ; qu’Alexandre était mort ; si l’on insistait en ajoutant qu’il la conduisait en personne, ils démentaient cette nouvelle, en publiant que c’était un autre Alexandre, fils d’Érope. Cependant le fils de Philippe part d’Oncheste le lendemain, s’approche de la ville, et campe près le bois sacré d’Iolas ; il laisse aux Thébains le temps du repentir et de lui envoyer une députation. Mais eux, loin d’entrer en accommodement, font une vive sortie avec leur cavalerie et leur troupe légère, dont les traits tombent sur les gardes avancées du camp ; quelques Macédoniens sont tués : les Thébains se portaient déjà sur l’armée, lorsque Alexandre les fit dissiper par des corps d’archers et de voltigeurs.

Le lendemain il s’avance vers les portes qui conduisent vers Éleuthères et Athènes. Sans trop s’approcher des remparts, il campe aux pieds de la citadelle de Cadmus pour secourir les siens qui l’occupaient. Les Thébains l’avaient cernée d’une double circonvallation pour fermer toute entrée aux secours extérieurs, et tout passage aux sorties qui auraient pu les inquiéter dans leurs excursions et pendant leur rencontre avec l’ennemi.

Alexandre, qui préférait la voie d’un raccommodement au hasard d’une action, temporisait encore. Ceux des Thébains qui consultaient le plus l’intérêt général étaient d’avis de se rendre et d’obtenir grâce pour la ville ; mais les bannis et ceux qui les avaient appelés, n’en attendant aucune d’Alexandre, quelques-uns même des principaux de la Béotie employaient tout pour exciter le peuple à combattre. Alexandre différait toujours l’attaque. Selon le récit de Ptolémée, Perdiccas, chargé de la garde du camp, se trouvant par sa position rapproché des retranchemens de l’en-