Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/314

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 306 —

Il changea encore la manière de faire la garde, défendant aux sentinelles de porter le bouclier en faction ; car leur service ne les obligeait point de combattre, mais seulement de donner l’alarme en cas d’approche de l’ennemi. Il abrégea de moitié le temps des gardes, qui duraient la journée entière.

Les soldats frappés de l’air de la Grèce devenaient raisonneurs ; ils devinaient, censuraient même, les desseins de leur général. Paul Émile les assembla, et leur dit qu’un soldat n’avait que trois choses à faire : tenir son corps le plus fort et le plus alerte qu’il est possible, ses armes en bon état, et des vivres prêts pour les occasions subites. Dans tout le reste, ajouta Paul Émile, on doit s’en remettre aux dieux et à son général.

Nous avons indiqué les changemens que Marius introduisit dans la composition légionnaire, changemens funestes sans aucun doute, puisqu’ils portèrent la corruption parmi les armées de la république, elles qui avaient brillé jusque-là des plus éminentes vertus. Considérée sous le point de vue tactique, la cohorte de Marius nous paraît dans plusieurs cas supérieure à l’ordonnance par manipules. Marius, aussi infatigable au faîte des honneurs qu’il l’avait été lorsque la poussière du camp le couvrait encore, n’épargnait pas plus ses soldats qu’il ne se ménageait lui-même.

Auguste, qui donnait à l’empire une face toute nouvelle, et rendait perpétuel le service des légions, fit aussi de grands changemens dans la milice : il établit de nombreux règlemens, et rappela les anciens que les troubles des guerres civiles avaient anéantis.

Avant cet empereur, il y avait pour les soldats quatre sortes de congé absolu : le premier (missio justa et honesta) était mérité par l’âge et par le service ; le second (missio causaria) s’accordait par des raisons de blessures et autres infirmités ; le troisième (missio gratiosa) passait pour une pure faveur accordée à ceux que les généraux voulaient ménager, mais les censeurs pouvaient le révoquer ; le quatrième enfin devenait infamant (missio turpis et ignominiosa), et la peine de quelque crime. Auguste fit deux degrés de congé légitime : l’un déchargeait de toute fonction militaire, excepté de celle de combattre ; l’autre exemptait même de cette obligation. Les récompenses des vétérans étaient peu de chose dans les premiers siècles de la république ; Auguste fit un règlement perpétuel pour assurer leur fortune.

Cet empereur ferma le temple de Janus, dieu conservateur des portes de Rome et de l’empire. Tant que la guerre durait, on ouvrait son temple, on lui offrait des sacrifices, afin qu’il interdît l’entrée des frontières et des villes aux ennemis ; mais aussitôt que la paix était décidée, on fermait les portes du temple avec de nouvelles cérémonies.

Depuis sept cents ans que Rome existait, le temple de Janus n’avait été fermé que deux fois : la première sous Numa, et encore la guerre régnait-elle autour de Rome, entre les petites nations qui partageaient l’Italie ; la seconde fois, après la deuxième guerre punique. L’Italie entière était alors en paix, mais la guerre s’allumait entre les Africains et les Carthaginois ; elle désolait la Grèce et l’Asie mineure, ainsi que tant d’autres contrées qui, toutes réunies enfin sous les heureuses lois d’Auguste, s’étonnèrent de ne plus combattre, et de jouir d’une paix qu’elles n’avaient pas connue pendant leur indépendance.

Les antiques Égyptiens ; les peuples