Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/331

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romain avec l’Inde ; et le Thibet, celle de l’Inde avec la Chine. La vaste presqu’île de l’Inde était garantie par l’Océan, qui l’environne en grande partie ; la Chine, à l’orient de l’Asie, se trouvait aussi défendue par la mer. Les nations qui erraient dans le centre de l’Asie pouvaient attaquer l’Inde par le nord, la Chine par l’occident et le septentrion ; mais elles ne pouvaient les envelopper.

La Perse seule se voyait menacée en même temps au nord par les Tartares, au midi par les Arabes, nation nomade, renfermée entre la mer Rouge et le golfe Persique. Les peuples agricoles de l’Asie étaient plus méridionaux que ceux de l’Europe ; ils s’étendaient depuis le cap Comorin, à l’extrémité sud de l’Inde, vers le 12e degré de latitude, jusqu’au 35e. Cependant la Chine remontait au 40e, dans une étendue de vingt-cinq degrés.

Les Tartares, sous des noms différens, erraient au 30e degré jusqu’au 55e ou 60e. Au delà, en s’avançant jusqu’à la mer Glaciale, on ne trouvait que de petites peuplades vivant de chasse ou de pêche, quand les frimas ne couvraient point leurs déserts.

En Europe, en Afrique, l’empire romain s’étendait du 20e degré de latitude jusqu’au 47e ou 48e ; dans cet espace de vingt-huit degrés, la mer Noire, la Méditerranée et la mer Adriatique en occupaient une grande partie. Les nomades, Goths ou Germains, s’élevaient du 45e degré au delà du 60e. En remontant plus au nord, on ne rencontre guère que les Lapons.

Au midi de l’empire et du mont Atlas se trouvait l’immense désert de Sahra, et par delà, le pays des nègres ; puis, en s’avançant plus au midi, d’autres nations tout-à-fait sauvages, jusqu’à l’extrémité sud de l’Afrique, où sont les Caffres et les Hottentots. Ces nations, inconnues à l’antiquité, ne se connaissaient pas elles-mêmes ; elles n’avaient jamais joué sur la terre d’autre rôle que celui des animaux.

En examinant ainsi le globe à l’époque dont nous parlons, on ne trouve de nations agricoles, policées, savantes, et fixes, que dans une latitude d’environ vingt-cinq degrés. Si l’on remonte vers le nord, il n’y a, dans une latitude de même étendue, que des nations qui, dédaignant de s’attacher au sol, tiraient leur subsistance du produit de leurs troupeaux et plaçaient leur industrie dans la guerre. On voit que les nations conservatrices étaient en Asie bornées par des mers, et par des déserts en Afrique. Tout ce qui s’est fait de mémorable sur le globe jusqu’à nos jours, s’est passé dans ces cinquante degrés de latitude.

Les nations errantes, contenues par les Romains depuis quatre cents ans, sur les bords du Rhin, du Danube, du Tanaïs, des Palus-Méotides, s’y étaient multipliées et enrichies par leurs communications avec l’empire ; elles on recevaient des subsides, et lui fournissaient sans doute des cuirs, des bestiaux et des fourrures, ainsi que des troupes auxiliaires. Les Barbares vétérans rapportaient dans leurs pays ce qu’ils avaient acquis par leur solde, et aussi par des vexations communes à toutes les troupes mal disciplinées.

Les Goths, situés au bord du Pont-Euxin et aux embouchures du Danube, étaient la nation la plus formidable de ces contrées ; cependant ce sont eux qui furent attaqués par les Huns, peuple nouveau, inconnu, engendré, disait-on, par des sorciers, et invincible à la guerre.

La cause qui avait fait sortir ce peuple des limites de l’Asie, fut toujours igno-

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