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POLYBE, LIV. I.

parce que, selon le premier arrangement, les parties étaient d’égale force, l’avantage fut aussi égal ; comme il arrive d’ordinaire, lorsqu’entre deux partis les forces de l’un ne cèdent en rien aux forces de l’autre. Enfin le corps que commandait Amilcar, ne pouvant plus résister, fut mis en fuite, et Manlius attacha à ses vaisseaux ceux qu’il avait pris. Regulus arrive au secours des triaires et des vaisseaux de charge, menant avec lui les bâtimens de la seconde flotte qui n’avaient rien souffert. Pendant qu’il est aux mains avec la flotte d’Hannon, les triaires qui se rendaient déjà reprennent courage, et retournent à la charge avec vigueur. Les Carthaginois, attaqués devant et derrière, embarrassés et enveloppés par le nouveau secours, plièrent et prirent la fuite.

Sur ces entrefaites, Manlius revient, et aperçoit la troisième flotte acculée contre le rivage par les Carthaginois de l’aile gauche. Les vaisseaux de charge et les triaires étant en sûreté, Regulus et lui se réunissent pour courir la tirer du danger où elle était ; car elle soutenait une espèce de siége, et elle aurait peu résisté si les Carthaginois, par la crainte d’être accrochés et de mettre l’épée à la main, ne se fussent contentés de la resserrer contre la terre. Les consuls arrivent, entourent les Carthaginois, et leur enlèvent cinquante vaisseaux et leur équipage. Quelques-uns, ayant viré vers la terre, trouvèrent leur salut dans la fuite. Ainsi finit ce combat en particulier ; mais l’avantage de toute la bataille fut entièrement du côté des Romains. Pour vingt-quatre de leurs vaisseaux qui périrent, il en périt plus de trente du côté des Carthaginois. Nul vaisseau équipé des Romains ne tomba en la puissance de leurs ennemis, et ceux-ci en perdirent soixante-quatre.




CHAPITRE VI.


Les Romains passent en Afrique, assiégent Aspis, et désolent la campagne. — Regulus reste seul dans l’Afrique, et bat les Carthaginois devant Adis. — Il propose des conditions de paix qui sont rejetées par le sénat de Carthage.


Après cette victoire, les Romains, ayant fait de plus grosses provisions, radoubé les vaisseaux qu’ils avaient pris, et monté ces vaisseaux d’un équipage sortable à leur bonne fortune, cinglèrent vers l’Afrique. Les premiers navires abordèrent au promontoire d’Hermée, qui, s’élevant du golfe de Carthage, s’avance dans la mer du côté de la Sicile. Ils attendirent là les bâtimens qui les suivaient, et, après avoir assemblé toute leur flotte, ils longèrent la côte jusqu’à Aspis. Ils y débarquèrent, tirèrent leurs vaisseaux dans le port, les couvrirent d’un fossé et d’un retranchement, et, sur le refus que firent les habitans d’ouvrir les portes de leur ville, ils y mirent le siége.

Ceux des ennemis, qui après la bataille étaient revenus à Carthage, persuadés que les Romains, enflés de leur victoire, ne manqueraient pas de faire bientôt voile vers cette ville, avaient mis sur mer et sur terre des troupes pour en garder la côte. Mais lorsqu’ils apprirent que les Romains avaient débarqué, et qu’ils assiégeaient Aspis, ils désespérèrent d’empêcher la descente, et ne songèrent plus qu’à lever des troupes et à garder Carthage et les environs. Les Romains, maîtres d’Aspis, y laissent une garnison suffisante pour la garde de la ville et du pays. Ils envoient ensuite à Rome pour y faire savoir ce qui était arrivé, et pour y prendre des ordres sur ce qui se devait faire dans la suite. En attendant ces ordres, toute l’armée fit du dégât dans la campagne. Personne ne faisant mine de les