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POLYBE, LIV. II.

LIVRE DEUXIÈME.

CHAPITRE PREMIER.


Récapitulation du livre précédent. — Mort d’Amilcar ; Asdrubal lui succède dans le commandement des armées. — Siége de Mydionie par les Étoliens. — Combat entre les Étoliens et les Illyriens. — Puissance de la fortune. Mort d’Agron, roi des Illyriens. — Teuta sa femme lui succède. — Phénice livrée par les Gaulois aux Illyriens, et remise en liberté par les Étoliens et les Achéens. — Imprudence des Épirotes.


On a vu, dans le livre précédent, en quel temps les Romains, après s’être établis dans l’Italie, pensèrent à établir leurs conquêtes au dehors ; comment ils passèrent en Sicile, et pourquoi ils eurent, au sujet de cette île, la guerre avec les Carthaginois ; et comment ils commencèrent à se faire des armées navales, et ce qui se passa dans ces deux états pendant tout le cours de cette guerre, qui chassa les Carthaginois de la Sicile et la soumit toute aux Romains, à l’exception du pays qui obéissait à Hiéron. On a vu encore comment s’est allumée la guerre entre les troupes étrangères et la république de Carthage ; jusqu’où les premiers ont porté leurs excès, et ce qu’ont produit les différens événemens de cette horrible révolte jusqu’à la victoire, qui extermina la plupart des séditieux et fit rentrer les autres dans leur devoir. Passons maintenant à ce qui s’est fait ensuite, sans nous écarter de la brièveté que nous nous sommes d’abord proposée.

La guerre d’Afrique terminée, les Carthaginois envoyèrent en Espagne une armée sous la conduite d’Amilcar. Celui-ci partit avec Annibal son fils, âgé pour lors de neuf ans, traversa le détroit formé par les colonnes d’Hercule, et rétablit dans l’Espagne les affaires de sa république. Pendant neuf ans qu’il resta dans ce pays, il soumit à Carthage un grand nombre de peuples, les uns par les armes, les autres par les négociations ; enfin il finit ses jours d’une manière digne de ses premiers exploits, les armes à la main et sur un champ de bataille, où, ayant en tête une armée très-nombreuse et très-aguerrie, il fit des prodiges de courage et de valeur. Les Carthaginois donnèrent ensuite le commandement à Asdrubal, parent d’Amilcar, et commandant des galères.

Ce fut vers ce temps-là que les Romains passèrent pour la première fois dans l’Illyrie. Cette expédition doit être considérée avec soin, si l’on veut entrer dans notre projet et connaître bien les progrès et l’établissement de la domination des Romains. Voici donc pourquoi ils prirent cette résolution : Agron, roi d’Illyrie, et fils de Pleurate, avait sur terre et sur mer de plus grandes armées qu’eussent jamais eues ses prédécesseurs. À force d’argent, Demetrius, père de Philippe, avait gagné sur ce roi qu’il porterait du secours aux Mydioniens, que les Étoliens assiégeaient pour se venger de ce qu’ils avaient refusé de les associer à leur république. Pour cela, ils avaient levé une puissante armée, et, s’étant allés camper tout autour de la ville, ils employèrent pour la réduire toutes sortes de machines. Déjà Mydionie était aux dernières extrémités, et les assiégés semblaient chaque jour devoir se rendre, lorsque le préteur des Étoliens,