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POLYBE, LIV. II.

Mégalopolitains qu’il ne manquerait pas de les secourir, si les Achéens le trouvaient bon.

Les ambassadeurs, à leur retour, remirent la lettre du roi, et se louèrent fort de l’accueil favorable qu’il leur avait fait et des bonnes dispositions où il semblait être. Les Mégalopolitains, rassurés par ce récit, coururent au conseil des Achéens pour les presser de faire venir Antigonus, et de le mettre à la tête des affaires. Aratus, de son côté, s’étant fait instruire en particulier par Nicophanès des sentimens où était le roi à l’égard des Achéens et de lui‑même, ne se possédait pas de joie. Il voyait par là combien il avait eu raison de former ce projet, et que d’ailleurs Antigonus n’était pas tant au nombre de ses ennemis que les Étoliens l’avaient espéré. Il lui semblait encore très-avantageux que les Mégalopolitains voulussent charger Antigonus du soin des affaires par l’entremise des Achéens. À la vérité, il souhaitait fort n’avoir pas besoin de secours ; mais, en cas qu’il fût contraint d’en demander, il aimait encore mieux le faire par les Achéens en corps que par lui‑même ; car il craignait qu’Antigonus, après avoir défait Cléomène et les Macédoniens, ne conçût de mauvais desseins contre la république des Achéens, et que ceux‑ci ne le rendissent responsable de tout le mal qui en arriverait ; ce qu’ils croiraient faire avec d’autant plus de justice, qu’il était l’auteur de l’injure faite à la maison royale des Macédoniens par la prise de l’Acrocorinthe. C’est pourquoi, après que les Mégalopolitains eurent montré dans le conseil des Achéens la lettre du roi et qu’ils eurent prié de l’appeler au plus tôt, tout le peuple commençant à goûter ce sentiment, Aratus entra dans le conseil, parla avec éloge de la protection que le roi voulait bien lui accorder, et approuva fort la résolution que voulait prendre le peuple. Mais il s’arrêta beaucoup à faire voir qu’il fallait essayer de défendre par eux‑mêmes la ville et le pays ; que rien ne serait plus glorieux, rien de plus conforme à leurs intérêts ; que si la fortune refusait de les favoriser, il ne fallait avoir recours à leurs amis qu’après avoir de leur côté mis tout en usage, et ne les appeler qu’à la dernière extrémité.

Il n’y eut personne qui n’approuvât cet avis, et l’on conclut qu’on devait s’y arrêter et soutenir cette guerre par soi‑même. Mais, après que Ptolémée, désespérant de conserver les Achéens dans son parti, et espérant beaucoup plus des Lacédémoniens pour le dessein qu’il avait de traverser les vues des rois de la Macédoine, se fut mis en tête de fournir des secours à Cléomène pour l’animer contre Antigonus ; après que les Achéens dans une marche en furent venus aux mains avec Cléomène et eurent été vaincus par lui près de Lycée ; qu’ils eurent été défaits une seconde fois dans les plaines de Mégalopolis, appelées Laodicéennes ; que Leusiadas eut été battu ; que toutes leurs troupes eurent été mises en déroute pour une troisième fois aux environs de Dyme, près de l’endroit qu’on appelle Hécatombée : alors, les affaires ne souffrant plus de délai, ils furent obligés de recourir unanimement à Antigonus. Aratus envoya son propre fils comme ambassadeur, et confirma ce qui avait été réglé pour le secours. Une chose embarrassait : Antigonus ne semblait pas devoir venir au secours d’Aratus, qu’on ne lui eût auparavant rendu l’Acrocorinthe, et que la ville même de Corinthe ne lui eût été donnée pour en faire sa place de guerre, et cependant les Achéens n’osaient livrer Co-