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POLYBE, LIV. IV.

gouvernement de leurs pères, n’avaient pas pensé à se nommer des rois ; mais dès qu’ils eurent avis que ce prince était mort, le peuple et le conseil des éphores souhaitèrent avec ardeur qu’on en élût. Ceux des éphores qui s’entendaient avec les soldats auteurs de l’alliance faite avec les Étoliens, en nommèrent un avec toutes les formes requises. C’était Agésipolis, encore enfant à la vérité, mais fils d’Agésipolis qui avait eu pour père Cléombronte, lequel avait commencé à régner lorsque Léonidas fut chassé de son royaume, et qui lui avait succédé parce qu’il touchait de fort près par sa naissance à cette famille. On donna pour tuteur à Agésipolis Cléomène, fils de Cléombronte, et frère d’Agésipolis, son père. De l’autre maison royale, quoiqu’il restât deux enfans qu’Archidamus, fils d’Eudamidas, avait eus de la fille d’Hippomédon, que cet Hippomédon, fils d’Agésilas et petit-fils d’Eudamidas, fût plein de vie, et qu’il y en eût encore plusieurs autres, quoique dans un degré plus éloigné, cependant on ne pensa point à eux ; et on mit sur le trône Lycurgue, parmi les ancêtres duquel il n’y avait jamais eu de rois, et la qualité de successeur d’Hercule et de roi de Sparte ne lui coûta qu’autant de talens qu’il y avait d’éphores, tant les grandes dignités s’achètent partout à peu de frais ! Aussi ce ne furent pas les enfans des enfans de ceux qui avaient fait cette folie qui en portèrent la peine, mais bien eux-mêmes.

Machatas, ayant appris ce qui s’était passé à Lacédémone, y revint une seconde fois pour pousser les éphores et les rois à déclarer la guerre aux Achéens. Il leur fit entendre qu’il n’y avait que cela seul qui pût pacifier les troubles qu’excitaient ceux des Lacédémoniens qui ne voulaient point d’alliance avec les Étoliens, et ceux des Étoliens qui faisaient tous leurs efforts pour détourner cette alliance. Après avoir réussi dans sa négociation par la sottise de ceux avec qui il traitait, il retourna dans son pays. Aussitôt Lycurgue, à la tête d’un corps de troupes auquel il avait joint quelques soldats de la ville, se jeta sur l’Argie, qui, se tranquillisant sur l’état présent de leur gouvernement, ne s’attendait rien moins qu’à une invasion de la part des Lacédémoniens. Il prit d’emblée Polychne, Prasie, Leuce et Cyphante, et, s’emparant de Glympe et de Zarace, enleva ces deux villes à la république des Argiens.

Après cette expédition, les Lacédémoniens firent publier qu’il fallait faire la guerre aux Achéens. Machatas souleva contre eux plusieurs autres peuples par les mêmes discours qu’il avait tenus aux Lacédémoniens. Tout réussissant à souhait pour les Étoliens, ils entreprirent hardiment la guerre. Il n’en fut pas de même des Achéens. Philippe, qui était toute leur espérance, étant encore occupé aux préparatifs, les Épirotes se faisaient attendre, et les Messéniens ne se donnaient aucun mouvement, et pendant ce temps‑là les Étoliens, profitant de la folie des Éléens et des Lacédémoniens, leur suscitaient la guerre de tous les côtés.

Le temps de la préture d’Aratus finissait alors, et son fils Aratus fut mis en sa place par les Achéens. Scopas, préteur des Étoliens, avait au moins fait la moitié de son temps ; car les Étoliens avaient élu leurs magistrats aussitôt après l’équinoxe d’automne, et les Achéens vers le lever des Pléiades. L’été commençant, et le jeune Aratus ayant pris le commandement, ce ne fut que guerres de toutes parts. Annibal marchait contre Sagonte et se disposait à en faire le siége ; les Romains, sous la conduite de L. Émilius, furent

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