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POLYBE, LIV. IV.

avaient reçu mille des Cnossiens, en sorte que ce furent les Crétois qui soutinrent cette guerre pour les uns et pour les autres. Les transfuges de Gortyne s’emparèrent aussi alors non-seulement du port de Phestie, mais aussi de celui de leur propre ville, et de là ils faisaient la guerre aux habitants. Tel était l’état des affaires dans l’île de Crète.

Ce fut encore vers ce temps que Mithridate déclara la guerre aux Sinopéens, guerre qui fut comme le commencement et l’occasion de tous les malheurs qui sont enfin tombés sur ce peuple. Ils envoyèrent des ambassadeurs à Rhodes pour demander du secours. Les Rhodiens choisirent pour cela trois citoyens, à qui ils donnèrent cent quarante mille drachmes. Sur cette somme on fournit aux Sinopéens tout ce qui leur était nécessaire, mille tonneaux de vin, trois cents livres de crins cordés, cent livres de cordes à boyaux préparées, trois mille pièces d’or au coin de la république, quatre catapultes, et des hommes pour les faire jouer. Les ambassadeurs, après avoir obtenu ce secours, retournèrent à Sinope, où, dans la crainte que Mithridate n’assiégeât la ville par terre et par mer, on se disposait à soutenir la guerre de l’un et de l’autre côté.

Sinope est située à la droite du Pont en allant vers le Phase. Elle est bâtie sur une presqu’île qui s’avance dans la mer, et couvre entièrement l’isthme qui joint cette presqu’île à l’Asie, et qui n’est que d’environ deux stades. Le reste de la presqu’île, qui s’avance dans la mer, est un terrain plat et d’où il est aisé d’approcher de la ville ; mais les bords tout autour du côté de la mer sont escarpés, et il n’y a que très-peu d’endroits où l’on puisse aborder. Les Sinopéens ; craignant que Mithridate n’attaquât la ville du côté de l’Asie, et qu’il ne fit une descente par mer au côté opposé et ne s’emparât des plaines et des postes qui dominent la ville, fortifièrent de pieux et de fossés tous les endroits de la presqu’île où l’on pouvait aborder, firent porter des armes dans les endroits qu’il était facile d’insulter, et y postèrent des troupes. Comme cette presqu’île n’est pas d’une grande étendue, avec peu de monde il est aisé de la défendre.




CHAPITRE XIII.


Les Étoliens tentent de surprendre Égyre ; ils manquent leur entreprise. — Euripidas leur préteur, pour se venger, ravage différentes contrées de la Grèce. — Faute de Philippe. — Irruption de Scopas sur la Macédoine.


Retournons à la guerre sociale. Philippe partit de Macédoine, et se jeta dans la Thessalie et dans l’Épire, pour passer de là dans l’Étolie. Vers le même temps Alexandre et Dorimaque, voulant surprendre Égire, assemblèrent environ douze cents Étoliens à Œnanthie, ville d’Étolie située vis‑à‑vis d’Égire, et, ayant disposé des pontons, ils n’attendaient plus qu’un temps propre pour exécuter leur dessein. Un Étolien qui avait vécu long-temps à Égire s’aperçut que les gardes de la porte d’Égion ne pensaient qu’à boire et à se divertir. Il était venu souvent trouver Dorimaque, qu’il connaissait homme à pareilles entreprises, pour lui persuader d’entrer furtivement dans Égire. Cette ville, bâtie sur le golfe de Corinthe entre Égion et Sicyone, à environ sept stades de la mer dans le Péloponnèse, est située sur des hauteurs escarpées et inaccessibles, d’où la vue s’étend sur le Parnasse et sur d’autres lieux circonvoisins. Dès que Dorimaque voit le temps favorable, il se met en mer, et loge pendant la