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POLYBE, LIV. VI.

bois a ordinairement deux coudées de long et un doigt de grosseur. La pointe est longue d’une grande palme, et si effilée qu’au premier coup elle se fausse, de sorte que les ennemis ne peuvent la renvoyer ; c’est ce qui la distingue de autres traits.

Les hastaires, plus avancés en âge, ont ordre de porter l’armure complète, c’est-à-dire un bouclier convexe, large de deux pieds et demi et long de quatre pieds ; le plus long est environ de quatre pieds et une palme : il est fait de deux planches collées l’une sur l’autre avec de la gélatine de taureau, et couvertes en dehors, premièrement d’un linge, et par-dessus d’un cuir de veau. Les bords de ce bouclier, en haut et en bas, sont garnis de fer pour recevoir les coups de taille, et pour empêcher qu’il ne se pourrisse contre terre. La partie convexe est encore couverte d’une plaque de fer, pour parer les coups violens, comme ceux des pierres, des sarisses et de tout autre trait envoyé avec une grande force, L’épée est une autre arme des hastaires, qui la portent sur la cuisse droite et l’appellent l’ibérique. Elle frappe d’estoc et de taille, parce que la lame en est forte. Ils portent outre cela deux javelots, un casque d’airain et des bottines. De ces javelots, les uns sont gros, les autres minces : les plus forts sont ou ronds ou carrés ; les ronds ont quatre doigts de diamètre, et les carrés ont le diamètre d’un de leurs côtés ; les minces ressemblent assez aux traits que les hastaires sont encore obligés de porter. La hampe de tous ces javelots, tant gros que minces, est longue à peu près de trois coudées ; le fer en forme de hameçon qui y est attaché, est de la même longueur que la hampe. Il avance jusqu’au milieu du bois, et y est si bien cloué, qu’il ne peut s’en détacher sans se rompre, quoiqu’au bas et à l’endroit où il est joint avec le bois, il ait un doigt et demi d’épaisseur. Sur leur casque ils portent encore un panache rouge ou noir, formé de trois plumes droites, et hautes d’une coudée, ce qui, joint à leurs autres armes, les fait paraître une fois plus hauts et leur donne un air grand et formidable. Les moindres soldats portent, outre cela, sur la poitrine une lame d’airain qui a douze doigts de tous les côtés, et qu’ils appellent le pectoral ; c’est ainsi qu’ils complètent leur armure. Mais ceux qui sont riches de plus de dix mille drachmes, au lieu de ce plastron, portent une cotte de mailles. Les princes et les triaires sont armés de la même manière, excepté qu’au lien de javelots ils ont des demi-javelots.

Dans ces trois dernières classes de soldats on en choisit dix des plus prudens et des plus braves pour en faire des chefs ; les plus jeunes n’ont point de part à ce choix. Après ces dix on en choisit dix autres, et ces vingt sont appelés chefs de files. Le premier élu a voix délibérative dans le conseil. Il y a encore vingt autres chefs ou serre-files, et ce sont les vingt premiers qui les choisissent. Chaque corps, à l’exception des vélites, est partagé en dix troupes, et chaque troupe a quatre officiers, deux à la tête et deux à la queue. Les vélites sont répandus en nombre égal dans les trois autres ordres. On appelle ces troupes cadre, manipules ou vexilles : et les chefs, centurions ou chefs de files. Ceux-ci choisissent chacun dans leur manipule, pour enseignes, deux hommes qui l’emportent sur leurs camarades en vigueur corporelle et en force d’âme. La raison pour laquelle on met deux centurions dans chaque compagnie, c’est qu’on ne sait ce que fera un seul, ni ce qui pourra lui ar-

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