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POLYBE, LIV. VIII.

composée de soixante galères à cinq rangs de rames, qui étaient remplies d’hommes armés d’arcs, de frondes et de javelots pour balayer les murailles. Il avait encore huit galères à cinq rangs de rames, d’un côté desquelles on avait ôté les bancs, aux unes à droite, aux autres à gauche, et que l’on avait jointes ensemble deux à deux par les côtés où il n’y avait pas de bancs. C’étaient ces galères qui, poussées par les rameurs du côté opposé à la ville, approchaient des murailles les machines appelées sambuques, et dont il faut expliquer la construction. C’est une échelle de la largeur de quatre pieds, qui, étant dressée, est aussi haute que les murailles. Les deux côtés de cette échelle sont garnis de balustrades et de courroies de cuir qui règnent jusqu’à son sommet. On la couche en long sur les côtés des deux galères jointes ensemble, de sorte qu’elle passe de beaucoup les éperons ; et au haut des mâts de ces galères on attache des poulies et des cordes. Quand on doit se servir de cette machine, on attache des cordes à l’extrémité de la sambuque, et des hommes l’élèvent de dessus la poupe par le moyen des poulies ; d’autres, sur la proue, aident aussi à l’élever avec des leviers. Ensuite, lorsque les galères ont été poussées à terre par les rameurs, des deux côtés extérieurs, on applique ces machines à la muraille. Au haut de l’échelle, est un petit plancher bordé de claies de trois côtés, sur lequel quatre hommes repoussent en combattant ceux qui des murailles empêchent qu’on n’applique la sambuque. Quand elle est appliquée, et qu’ils sont arrivés sur la muraille, ils jettent bas les claies, et, à droite et à gauche, ils se répandent dans les créneaux des murs ou dans les tours. Le reste des troupes les suivent sans crainte que la machine leur manque, parce qu’elle est fortement attachée avec des cordes aux deux galères. Or, ce n’est pas sans raison que cette machine a été appelée sambuque ; on lui a donné ce nom, parce que, l’échelle étant dressée, elle forme avec le vaisseau un ensemble qui a l’air d’une sambuque.

Tout étant préparé, les Romains se disposaient à attaquer les tours ; mais Archimède avait aussi de son côté construit des machines propres à lancer des traits à quelque distance que ce fût. Les ennemis étaient encore loin de la ville, qu’avec des balistes et des catapultes plus grandes et plus fortement bandées, il les perçait de tant de traits qu’ils ne savaient comment les éviter. Quand les traits passaient au-delà, il en avait de plus petites proportionnées à la distance, ce qui jetait une si grande confusion parmi les Romains, qu’ils ne pouvaient rien entreprendre ; de sorte que Marcellus, ne sachant quel parti prendre, fut obligé de faire avancer sans bruit ses galères pendant la nuit. Mais quand elles furent vers la terre à la portée du trait, Archimède inventa un autre stratagème contre ceux qui combattaient de dessus leurs vaisseaux. Il fit percer à hauteur d’homme et dans la muraille des trous nombreux et de la largeur de la main. Derrière ces meurtrières il avait posté des archers et des arbalétriers qui, tirant sans cesse sur la flotte, rendaient inutiles tous les efforts des soldats romains. De cette manière, soit que les ennemis fussent éloignés ou qu’ils fussent près, non-seulement il empêchait tous leurs projets de réussir, mais encore il en tuait un grand nombre. Et quand on commençait à dresser des sambuques, des machines disposées au dedans des murailles, et que l’on n’apercevait pas la plupart du temps, s’élevaient alors sur les forts et éten-