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POLYBE, LIV. X.

cipitent avec tant de force, qu’elles tombent à plus d’un stade du rocher. On dit que c’est le long de ce rocher, et pour ainsi dire sous le fleuve même, que les Aspasiaques passent à cheval pour entrer par terre dans l’Hyrcanie. L’autre manière a plus de vraisemblance ; car on assure qu’à l’endroit où tombe le fleuve sont de vastes espaces de terrain plat qu’il creuse par la violence de sa chute ; que là, après avoir formé un précipice assez profond, il disparaît pour reparaître ensuite, après avoir parcouru sous terre un faible espace, et que les Barbares qui ont une grande connaissance du pays, entrent par cette espèce de pont naturel, que forme ainsi l’Oxus dans l’Hyrcanie, avec leurs chevaux. (Dom Thuillier.)


Victoire d’Antiochus sur Euthydème, qui s’était révolté.


Antiochus, averti qu’Euthydème était campé près de la Tapurie, et que dix mille hommes de cavalerie sur le bord de l’Arius en défendaient le passage, prit le parti de faire lever le siége, de passer le fleuve et de marcher droit aux ennemis. Après deux jours de marche assez modérée, au troisième, ayant après le souper donné ordre à la phalange de lever le camp dès le point du jour, il prend sa cavalerie, ses troupes légères et dix mille rondachers, et se dirige la nuit à marche forcée vers le fleuve, sur l’avis qu’il avait eu que la cavalerie ennemie, qui en gardait le bord pendant le jour, se retirait la nuit dans une ville qui en était éloignée au moins de vingt stades. N’ayant à traverser qu’un pays plat et fort avantageux pour la cavalerie, quand le jour commença à paraître, il avait déjà fait passer l’Arius à la plus grande partie de ses troupes. La cavalerie bactrienne informée de la chose par ses espions, court au fleuve et fond sur les ennemis qu’elle rencontre sur sa route. Antiochus, se voyant dans la nécessité de soutenir le premier choc de cette cavalerie, encourage les deux mille hommes qui avaient coutume de combattre autour de lui, ordonne aux autres de se ranger par compagnies et par escadrons, et de prendre chacun le poste où ils avaient coutume de se mettre, et, allant au devant des Bactriens avec ses deux mille hommes d’élite, il en vient aux mains avec les premiers qui se présentent. Il se distingua plus qu’aucun des siens pendant ce combat. De part et d’autre on perdit beaucoup de monde, mais le premier corps de troupes des Bactriens fut enfoncé. Le second et le troisième étant venus à la charge, les troupes du roi furent pressées, et le désordre commençait à se mettre dans leurs rangs ; mais Panetole, ordonnant au reste de la cavalerie de charger, tira le roi et ses soldats du danger où ils étaient, et contraignit les Bactriens, qui combattaient tumultueusement et sans garder leurs rangs, à prendre la fuite. Panetole mit alors à leur poursuite, et les serra de si près qu’ils ne s’arrêtèrent que lorsqu’ils eurent joint Euthydème, et qu’après avoir perdu beaucoup de monde. La cavalerie du roi, ayant fait un grand carnage des ennemis et un grand nombre de prisonniers, sonna la retraite et campa ce jour-là même sur le bord du fleuve. Antiochus dans ce combat eut un cheval tué sous lui. Il reçut lui-même à la bouche une blessure qui lui fit perdre quelques-unes de ses dents. De toutes les actions où il s’est trouvé, aucune ne lui a fait une plus grande réputation de valeur que celle-ci. Pour Euthydème, il fut si effrayé de cette bataille, qu’il s’enfuit à Zariaspe, ville de la Bactriane, avec toute son armée. (Dom Thuillier.)