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POLYBE, LIV. XVI.

en même temps d’autres de Rome pour l’en détourner. Le peuple, ayant entendu les derniers, jugea qu’il fallait se tenir attaché aux Romains, et rechercher leur amitié. (Ambassades.) Dom Thuillier.


Expédition de Philopœmen contre Nabis, tyran de Lacédémone.


Philopœmen, se disposant à marcher contre Nabis, commença par examiner la distance qu’il y avait entre les villes de l’Achaïe, et quelles étaient celles où l’on pouvait aller par le même chemin. Ensuite il écrivit une lettre à chaque ville, et donna ordre qu’elles fussent portées aux plus éloignées, les distribuant de façon que chacune ne recevait pas seulement chaque jour celle qui lui était adressée, mais celles qui étaient écrites à toutes les autres villes qui se rencontraient sur la même route. La première s’adressait au gouverneur, et portait : « Aussitôt la présente reçue, vous assemblerez sur la place tout ce « que vous avez d’hommes propres à la guerre ; vous leur donnerez des vivres pour cinq jours, de l’argent et des armes, et vous les conduirez à la ville voisine. Quand vous y serez arrivé, rendez au gouverneur la lettre que je vous envoie pour lui, et suivez exactement ce qui y est marqué. » Cette seconde lettre était conçue en mêmes termes que la première, il n’y avait de différent que le nom de la ville où l’on devait marcher. La même chose s’observant pour toutes les villes, il tira de là deux avantages ; c’est que personne ne savait pour quelle expédition ces troupes étaient en marche, et que les troupes elles-mêmes ne connaissaient leur route que dans la première ville où on les conduisait. On se réunissait les uns aux autres, sans savoir de quoi il s’agissait, et cependant l’on marchait toujours en avant ; et comme les villes les plus éloignées de Tégée n’en étaient pas à égale distance, les lettres ne furent pas données à toutes en même temps, mais à proportion de leur éloignement. D’où il arriva que, sans que les Tégéates ni ceux qui arrivaient chez eux sussent ce qui se tramait, tous les Achéens en armes entrèrent de tous les endroits dans Tégée. Philopœmen avait imaginé cet expédient pour dérober son dessein à la connaissance des espions du tyran de Sparte, et des gens avides de nouvelles qu’il apostait de tous côtés. Le jour que tous les Achéens devaient arriver à Tégée, il donna ordre aux troupes choisies de passer la nuit autour de Sellasie, et dès que le jour paraîtrait, de se jeter sur la Laconie ; en cas que celles qui étaient à la solde des Lacédémoniens les incommodassent, de se retirer à Scotite ; et pour le reste, d’obéir en tout à Didascondas de Crète, à qui il avait fait connaître ses intentions et développé tout son projet. Cet ordre exécuté, il commanda aux Achéens de souper de bonne heure. Il partit ensuite de Tégée, et, forçant sa marche, il arriva au point du jour aux environs de Scotite, et y campa. Cette ville est entre Tégée et Lacédémone. Le lendemain la garnison de Pellène, qui était composée de soldats mercenaires, ne fut pas plutôt avertie que les Achéens faisaient des courses dans le pays, qu’elles sortit pour les arrêter, comme elle avait coutume de faire, et pour les combattre. Les Achéens battent en retraite, selon l’ordre qu’ils en avaient reçu. La garnison les poursuit vivement ; elle vient où les ennemis étaient en embuscade ; les Achéens paraissent, et en taillent en pièces une partie ; le reste fut fait prisonnier. (Dom Thuillier.)