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POLYBE, LIV. XVIII.

Quand le général romain se fut ainsi précautionné, il se mit en marche à la tête de toutes ses troupes. Il alla d’abord à petites journées, et lorsqu’il fut à cinquante stades de Phérée, il posa là son camp. Le lendemain, au point du jour, il envoya à la découverte pour savoir où étaient les ennemis et ce qu’ils faisaient. Philippe, de son côté, ayant appris que les ennemis étaient campés autour de Thèbes, partit de Larisse avec toute son armée et prit la route de Phérée. À trente stades de cette ville, il campa et donna ordre aux troupes de prendre leur repos. Avant le jour, il envoya son avant-garde occuper les hauteurs qui sont autour de Phérée, et dès que le jour parut, il fit sortir l’armée de ses retranchemens. Peu s’en fallut que ceux qu’on avait détachés de part et d’autre ne se rencontrassent sur les hauteurs et n’en vinssent aux mains. À travers l’obscurité, ils s’aperçurent les uns les autres, s’arrêtèrent à une certaine distance, et dépêchèrent aux généraux pour savoir quel parti ils prendraient. Ces généraux jugèrent à propos de ne pas sortir de leur camp, et de rappeler ceux qu’ils avaient envoyés devant. Le jour d’après, ils firent un détachement de trois cents chevaux et d’autant de vélites pour aller aux nouvelles. Flaminius se servit pour cela de deux turmes d’Étoliens, parce qu’ils connaissaient bien le pays. Les deux détachemens se rencontrèrent sur le chemin de Phérée à Larisse, et il se donna là un combat fort vif. Eupolème, Étolien, s’y distingua par sa valeur ; il engagea les Italiens dans l’action, et les Macédoniens furent battus. Après une longue escarmouche, chacun se retira dans son camp.

Le lendemain, les deux généraux ne s’accommodant pas d’un terrain aussi couvert d’arbres, de haies et de jardinages que celui de Phérée, levèrent le camp. Philippe tourna vers Scotuse pour s’y fournir de toutes les munitions nécessaires et choisir ensuite un terrain plus convenable ; mais Flaminius, soupçonnant que c’était là son dessein, se mit en marche en même temps que lui, et fit grande diligence pour ravager tout ce qu’il y avait de maisons dans la campagne de Scotuse. Une chaîne de montagnes, qui, sur la route se trouvait entre les deux armées, fit que ni les Romains ne purent savoir quel chemin tenaient les Macédoniens, ni ceux-ci celui des Romains. Après avoir marché tout le jour, le général romain campa dans un lieu qu’on appelle Érétrie de Phérée, et Philippe près la rivière d’Oncheste, sans que l’un des deux connût où était le camp de l’autre. On se remit en marche le jour suivant. Philippe campa à Mélambie dans le territoire de Scotuse ; et Flaminius à Thétidie autour de Pharsale, l’un et l’autre ignorant encore où campait son adversaire. Une grosse pluie accompagnée de tonnerre effroyable était tombée ce jour-là, et le lendemain matin le temps fut si couvert et si sombre qu’à peine voyait-on à deux pas du lieu où l’on était. Cela n’empêcha pas que Philippe, qui avait son projet en tête, ne décampât : mais incommodé dans sa marche par l’obscurité du temps, après avoir fait quelque peu de chemin, il se retrancha, et détacha un corps de troupes avec ordre de s’emparer du sommet des hauteurs qui séparaient son camp de celui des Romains. Flaminius, campé à Thétidie, n’était pas moins en peine de découvrir où il trouverait les Macédoniens. Il fit partir dix turmes de cavalerie et environ mille soldats armés à la légère, leur ordonnant de reconnaître avec soin les endroits où ils passeraient et de piller la campagne. Ce détachement tomba, sans y