Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/865

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion
857
POLYBE, LIV. XVIII.

pas en abusant du mauvais état où se trouvait Philippe, mais les revendiquait en se servant des moyens que les conjonctures présentes lui offraient ; qu’en rétablissant les Lysimachiens dans leur ville, dont ils avaient été indignement chassés par les Thraces, et en peuplant cette colonie, il ne faisait nulle injustice aux Romains ; qu’en cela il n’avait point eu en vue de prendre les armes contre eux, mais seulement de faire de cette place une capitale pour Séleucus, son fils ; que les villes de l’Asie qui étaient gouvernées selon leurs lois, ne devaient pas tenir leur liberté des Romains, mais de sa pure libéralité ; qu’à l’égard de Ptolémée et des démêlées qu’ils avaient ensemble, il en passerait par tout ce qui plairait à ce prince, et que son dessein était non-seulement de lier amitié avec lui, mais encore d’entrer dans son alliance.

Lucius ayant été d’avis qu’il fallait appeler les Lampsacéniens et les Smyrnéens et demander leur sentiment, on les appela. Parménion et Pythodore entrèrent de la part des premiers, et Cœranus de la part des autres. Comme ils parlaient avec beaucoup de liberté, le roi, chagrin de paraître devant les Romains, rendre compte de ses actions à des gens qui lui disputaient quelque chose, interrompit Parménion en disant que ce n’était pas les Romains, mais les Rhodiens qu’ils voulait pour les juges de leurs différends. Là-dessus l’assemblée se sépara sans que l’on fût convenu de rien. (Dom Thuillier.)

Au cas où ils seraient réduits à l’extrémité, ils étaient déterminés à avoir recours aux Romains, et à se donner à cette république eux et leur ville. (Suidas in Τρέχειν.) Schweigh.


VII.


Mort de Scopas.


On voit peu de personnes qui ne souhaitent se distinguer par des actions de courage ; mais il en est peu qui aient la hardiesse de les entreprendre. Scopas, pour échapper à sa disgrâce par un coup de vigueur, a eu plus de secours que Cléomène, qui, surpris et prévenu, n’avait pour toute ressource que ses propres domestiques et ses amis. Cependant celui-ci se défendit jusqu’à la dernière extrémité, et aima mieux mourir glorieusement que de vivre déshonoré. Scopas, au contraire, quoiqu’il eût un nombreux corps de troupes à sa disposition, et que, sous un roi enfant, l’occasion ne lui manquât point, se laissa prévenir à force de différer et de délibérer. Sur l’avis qu’Aristomène avait reçu, qu’il avait assemblé chez lui ses amis et qu’il les consultait sur le parti qu’il aurait à prendre, il envoya quelques gardes pour l’avertir de la part du roi qu’on l’attendait dans le conseil. À ce seul mot, Scopas fut si déconcerté, qu’il n’osa ni rien exécuter de ce qu’il méditait, ni obéir à son prince. C’était être insensé au dernier point. Aristomène, averti de sa sottise, fait environner la maison de soldats et d’éléphans, et envoie Ptolémée, fils d’Eumène, avec quelques soldats, pour lui réitérer les ordres du roi, et, en cas de refus, l’amener de force au conseil. Ptolémée entre et dit à Scopas que le roi le demandait. Celui-ci ne fait pas attention à ce qu’on lui dit ; il attache ses regards sur Ptolémée, comme lui faisant des menaces, et admirant sa hardiesse. Ptolémée s’approche et le saisit par le manteau. Scopas crie au secours. Mais les soldats étant entrés, et quelqu’un ayant dit que la maison