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POLYBE, LIV. XXI.

haitait, qu’Antiochus était prêt à la lui donner, quelle qu’elle fût ; et qu’enfin ce prince partagerait avec lui les revenus de son royaume. De toutes ces offres, Publius n’accepta que celle qui regardait son fils, et dit qu’il serait obligé à Antiochus si sur ce point il tenait parole ; mais qu’à l’égard des autres, aussi bien celles qu’il avait faites dans le conseil que celles qu’il venait de lui faire en particulier, il entendait tout-à-fait mal ses intérêts ; que peut-être les propositions d’Antiochus eussent été écoutées, s’il les eût envoyées pendant qu’il était à Lysimachie et maître de l’entrée de la Chersonèse ; ou encore si, après avoir quitté ces deux postes, il eût paru à la tête d’une armée sur les bords de l’Hellespont pour empêcher que les Romains ne passassent dans l’Asie. « Mais à présent, dit-il, que nos troupes y sont campées, sans qu’il s’y soit opposé ; à présent que nous avons mis un frein à son ambition, et que nous sommes ses maîtres, il ne lui est pas permis de traiter avec nous à des conditions égales, et il juste que ses propositions soient rejetées. » Il ajouta qu’il eût à prendre de plus sages mesures, et qu’il fît sérieusement attention à l’extrémité où il était réduit ; que pour lui témoigner combien il était reconnaissant de l’offre qu’il lui avait faite de lui rendre son fils, il l’exhortait à céder sur tout ce que les Romains exigeraient de lui et à ne les attaquer en nulle manière. Héraclide s’en retourna vers Antiochus, qui, ayant entendu la réponse des Romains, ne pensa plus à la paix. S’il devait être pris les armes à la main, il n’avait rien à craindre de plus triste que ce qu’on lui ordonnait : il donna donc tous ses soins à se préparer à une nouvelle bataille. (Ambassades.) Dom Thuillier.


III.


Paix entre Antiochus et les Romains, et à quelles conditions.


Les Romains ayant gagné la victoire contre Antiochus, et pris Sardes avec quelques citadelles, Musée, en qualité de héraut, vint les trouver de la part de ce prince. Reçu gracieusement par Publius, il dit que le roi, son maître, voulait leur envoyer des ambassadeurs pour traiter avec eux, et qu’il venait pour lui demander un sauf-conduit, qu’on lui accorda. Quelques jours après, ces ambassadeurs arrivèrent ; c’était Zeuxis, autrefois satrape de la Lydie, et Antipater, son neveu. Le premier avec qui ils tâchèrent d’abord de s’aboucher était Eumène ; ils craignaient que les anciens démêlés qu’il avait eus avec Antiochus ne le portassent à indisposer le conseil contre eux. Mais, contre leur attente, ils le trouvèrent doux et modéré ; ainsi ils ne pensèrent plus qu’à la conférence. Appelés au conseil, entre autres choses sur lesquelles ils s’étendirent beaucoup, ils exhortèrent les Romains à profiter de leurs avantages avec sagesse et avec modération ; ils dirent que ces vertus n’existaient pas dans Antiochus, mais qu’elles devaient être précieuses aux Romains que la fortune avait faits les maîtres de l’univers. Ensuite ils demandèrent ce qu’il fallait que ce prince fit pour la paix et pour être ami des Romains. Après quelque délibération, Publius, par ordre du conseil, répondit que les Romains victorieux n’imposeraient pas des lois plus dures qu’avant la victoire ; qu’ainsi les conditions seraient les mêmes qui leur avaient été marquées, lorsqu’avant le combat ils étaient venus sur le bord de l’Hellespont ; savoir : qu’Antiochus se retirerait de l’Europe, et, dans l’Asie, de tout