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POLYBE, LIV. XXII.


V.


Ambassades de toutes les nations de l’Asie vers Manlius. — Traité de paix entre Antiochus et les Romains.


Pendant que Cn. Manlius était en quartier d’hiver à Éphèse, et la dernière année de la présente olympiade, les villes grecques de l’Asie et plusieurs autres envoyèrent des ambassadeurs à ce consul, pour le féliciter de la victoire qu’il avait remportée sur les Gaulois, et lui apporter des couronnes. La joie de tous les peuples qui sont en deçà du mont Taurus n’était pas tant fondée sur ce que, Antiochus vaincu, ils étaient délivrés, les uns des impôts dont ils étaient chargés, les autres, des garnisons qu’ils avaient chez eux, tous de la nécessité d’obéir aux ordres de ce prince, que sur ce qu’ils n’avaient plus rien à craindre des Barbares, et qu’ils ne souffriraient plus de leur part les insultes et les injustices qu’ils avaient coutume d’en souffrir. Antiochus, les Gaulois et Ariarathe, roi de Cappadoce, députèrent aussi au consul pour savoir à quelles conditions la paix leur serait accordée. Ariarathe s’était joint à Antiochus, et il s’était trouvé à la bataille que les Romains venaient de gagner. Il craignait d’en être puni, et dans l’inquiétude où il était, il envoyait députés sur députés pour apprendre ce qu’on voulait qu’il donnât ou qu’il fît pour obtenir le pardon de sa faute. Toutes les ambassades des villes furent reçues avec bonté ; le consul les loua fort et les renvoya. Ensuite il répondit aux autres. Il dit aux Gaulois qu’il attendait pour faire la paix avec eux, qu’Eumène fût arrivé ; à ceux d’Ariarathe, qu’ils eussent à payer six cents talens ; à Musée, ambassadeur d’Antiochus, que son maître, avant que de parler de paix, vînt avec son armée sur les frontières de la Pamphylie, qu’il y apportât deux mille cinq cents talens et le blé qui se devait distribuer aux soldats, selon le traité fait auparavant avec Lucius Scipion. Et dès que la belle saison lui permit d’entrer en campagne, ayant expié son armée par des sacrifices, il partit avec Attalus, et, en huit jours de marche, il arriva à Apamée. Il n’y séjourna que trois jours ; le troisième il leva le camp, et, marchant à grandes journées, il campa trois jours après dans l’endroit où il avait marqué aux ambassadeurs d’Antiochus de le venir joindre. Musée s’y rencontra en effet, et pria Manlius d’y rester jusqu’à ce que les chariots et les bêtes de charge, qui apportaient le blé et l’argent, fussent arrivés. Elles entrèrent dans le camp au bout de trois jours. Le blé fut distribué aux troupes, et les talens, par l’ordre du proconsul, furent conduits par un tribun à Apamée. Après quoi, sur l’avis que Manlius reçut que le commandant de la garnison de Perga n’avait pas évacué la place, et que lui-même y demeurait encore, il s’en approcha avec son armée. Il en était déjà proche, lorsque le commandant vint à sa rencontre, pour le supplier de ne lui savoir pas mauvais gré d’être resté dans Perga, disant que son devoir avait demandé qu’il n’abandonnât point cette place ; qu’y ayant été mis par Antiochus, il avait voulu la conserver jusqu’à ce qu’il sût de celui qui la lui avait confiée, ce qu’il avait à faire ; que, jusqu’à présent, personne ne lui avait encore déclaré ses intentions ; qu’il lui accordât trente-neuf jours pour s’informer et apprendre du roi ce qu’il fallait qu’il fît. Manlius eut d’autant moins de peine à consentir à ce délai, qu’en toutes choses, il trouvait Antiochus très-fidèle à sa parole. Quelques jours après, Perga fut remise en liberté.