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POLYBE, LIV. XXXII.

négligé la partie de ce royaume qui regarde la mer Adriatique. D’ailleurs, depuis la décision des affaires de Macédoine, douze ans s’étaient écoulés, pendant lesquels les Italiens avaient joui d’une paix profonde, et l’on craignait qu’un repos plus long ne les amollît et n’affaiblît leur courage. On voulut comme renouveler leur ancienne ardeur pour les armes en les leur faisant prendre contre l’Illyrie. Ajoutons qu’on voulait jeter l’épouvante parmi les Illyriens, et les rendre dociles aux ordres qui dans la suite leur seraient envoyés. Telles furent les vraies causes de la guerre contre les Dalmates. On publiait cependant hors de l’Italie qu’on ne le faisait que pour venger l’insulte qui avait été faite à Fannius ; mais cette insulte n’en était que le prétexte. (Ibid.)


Ariarathe vient à Rome et y perd sa cause contre les ambassadeurs de Démétrius et d’Holopherne.


Ariarathe arriva à Rome avant la fin de l’été, et alors Sextus Julius et son collègue dans le consulat étaient entrés en charge. Dans les conférences qu’il eut avec eux, il donna la plus triste idée qu’il put du malheur dans lequel il était tombé. Mais il trouva là Miltiade que Démétrius avait député, et qui était également préparé et à réfuter ses accusations et à l’accuser lui même. Holopherne avait aussi envoyé Timothée et Diogène, qui avaient une couronne à présenter de sa part, avec ordre de renouveler son alliance avec les Romains, de le justifier contre les plaintes d’Ariarathe, et d’en faire contre ce prince. Dans les conférences particulières, Diogène et Miltiade brillaient plus et faisaient plus d’impression que le roi de Cappadoce. On ne doit pas en être surpris. Ils étaient plusieurs contre un seul ; l’éclat qui les environnait éblouissait les yeux, et on ne les détournait qu’avec peine sur un roi triste et malheureux. Aussi, quand il s’agit de plaider chacun sa cause, les ambassadeurs eurent-ils un grand avantage sur le prince. Sans aucun égard pour la vérité, il leur fut permis de dire tout ce qu’il leur plut, et tout ce qu’ils disaient demeurait sans réplique, parce qu’il n’y avait personne qui prît la défense de l’accusé. Le mensonge l’emporta sans peine sur la vérité, et ils obtinrent tout ce qu’ils voulurent. (Ibid.)


Charops.


Après la mort de Lycisque, le feu de la guerre civile s’éteignit dans l’Étolie, et la province jouit d’une tranquillité parfaite. La Béotie commença aussi à respirer après la guerre de Mnasippe de Coroné, et celle de Chrématas fut aussi très-avantageuse à l’Acarnanie. La Grèce se trouva comme purifiée par la mort de ces hommes pestilentiels. Le bonheur voulut aussi que l’Épirote Charops mourût cette année même à Brindes ; mais la cruauté et les injustices que ce traître avait exercées après la défaite de Persée firent que sa mort ne mit pas fin aux troubles qu’il avait excités dans l’Épire après la guerre contre Persée ; car après que Lucius Anicius eut condamné à être conduits à Rome tout ce qu’il y avait de plus illustres Grecs soupçonnés, même légèrement, d’avoir penché pour Persée, cet Épirote, ayant plein pouvoir de faire tout ce qui lui plaisait, s’emporta à tous les excès imaginables, agissant tantôt par lui-même, tantôt par le ministère de ses amis. Quoiqu’il fût jeune encore et environné de scélérats, qui ne s’étaient assemblés autour de lui