Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cartouches et de poudre. Quelques hommes s’arrêtèrent ; mais X ayant ajouté : « Et puis, quand vous aurez fusillé tous ces gens-là ! » Un garde menaçant, lui dit : « Si tu n’es pas content, nous allons te régler ton affaire, à toi aussi ! »

Les détonations retentirent Séparés à peine par une mince cloison, nous entendîmes pendant huit mortelles minutes, les feux de peloton et les coups isolés. Par intervalle, le feu cessait quelques secondes, puis reprenait ; on avait rechargé les armes. Pâles, accoudés autour d’une table, les mains aux oreilles, essayant d’étouffer le son, les yeux fermés, nous dûmes tout subir. A la fin, des applaudissements se firent entendre au dehors ; il nous brisèrent le cœur plus encore que la fusillade.

Combien de nous auraient joyeusement donné leur vie pour épargner cette souillure à la défense. — Nous crûmes avoir épuisé l’horreur. Mais le dimanche, nous devions voir à l’œuvre les Versaillais.

En ce moment, les soldats entraient à la Villette, ayant tourné la grande barricade de la Rotonde. Dans l’usine à gaz, ils tuèrent neuf employés, et sans l’intervention du directeur, ils auraient massacré tous ceux de l’établisse-