Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/226

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chasseurs à cheval faisaient la haie, le sabre au poing. — Il arriva que les soldats, pris de panique ou de rage, déchargèrent leurs chassepots dans le tas. Dans la nuit du 25 au 26 mai, il y eut une sorte d’émeute, ou du moins les gardiens l’affirmèrent. Trois cents prisonniers furent passés par les armes. Amenés au bord d’une fosse garnie de paille ils y furent précipités à coups de fusil, puis on arrosa le tout de pétrole et on mit le feu. Beaucoup n’étaient pas morts. Il y eut des hurlements épouvantables. A de certaines heures, ordre était donné à tous de se lever, de se coucher sur le côté gauche ou sur le côté droit, et toute infraction à ce commandement était suivie de coups de revolver.

Les journaux ne tarissaient pas sur la mine ignoble des prisonniers. « Ces êtres sont hideux, » disait Paris-Journal. " « Toutes ces faces sont hargneuses, bilieuses, renfrognées » (Figaro). « Visages patibulaires » (la France). « Chienlits maquillés de sang et de poudre, qui volaient à jeun et tuaient après dîner » disait un autre. Ces messieurs trouvaient étonnant que des gens qu’on couche dans la boue et en plein air, dont on fusille de temps en temps quelques centaines, n’eussent pas la mine fleurie d’un rédacteur versaillais. Et flétrir la mauvaise et triste mine