Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/79

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du dévouement héroïque que le peuple montrait à la défense de sa cause :

» On m’apporta un homme âgé de quarante ans, qui avait reçu une balle dans les poumons. Il n’avait qu’une demi-heure à vivre, et après avoir été pansé d’une façon peu habile par le barbier, il fut déposé dans un coin de la salle. J’étais à ma besogne, quand un cri violent me fit retourner. C’était le blessé qui l’avait poussé, et je le vis essayer de se lever sur ses mains et ses genoux. Je lui demandai ce qu’il désirait, et, après quelques efforts, il dit : " Citoyen, je suis un soldat de la République universelle ; je me suis battu en 48 et maintenant je meurs en 71. Dites à mes amis que je crie en expirant : Vive la Commune ! » Quelques convulsions et il n’était plus.

» Un autre, un jeune Polonais, de l’état-major de Dombrowski, reçut une balle dans le ventre et fut transporté une heure après dans mon ambulance. La perte de sang avait été si forte qu’il était presque mort. Je le soignai pourtant, et on alla chercher son frère aîné, qui était du même régiment que lui. Quand il arriva, je lui montrai son jeune frère blessé, qui lui dit : « Je rejoindrai mon régiment dans une demi-heure ; demande à Dombrowski de m’accorder