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LE POÈME DE LA FEMME

I


Insensible à l’éclat dont se parait la terre,
L’homme, au sein de l’Éden, se sentait solitaire ;
Car il ne pouvait pas, de ce monde enchanté,
Étreindre sur son cœur l’impalpable beauté.
Mais un jour, à ses yeux, la féconde nature,
De tous ses dons brillants prodigués sans mesure,
Fit un vivant bouquet, de jeunesse embaumé.
« Ô femme, viens à moi, s’écria-t-il charmé,
Femme ! Dieu n’eût rien fait, s’il n’eût fait que la rose :
La rose prend un souffle et ta bouche est éclose.
Dieu, de tous les rayons répandus dans les cieux,
Concentre les plus doux pour animer tes yeux.
Avec l’or de la plaine et le lustre de l’onde,
Il fait ta chevelure étincelante et blonde.
Il couronne ton front de paix et de splendeur
En y posant ce lys qu’on appelle candeur ;
Et, du frémissement des feuilles remuées,
Du caprice des flots et du vol des nuées,
De tout ce que la grâce a d’heureux mouvement,
Il forme ta caresse et ton rire charmant.
Il teint du frais carmin de l’aurore vermeille,
De tes beaux seins en fleur la pudique merveille,
Et la terre n’a rien, ni l’onde, ni l’azur,
Qu’on ne retrouve en toi plus brillant et plus pur…
Et c’est ainsi qu’objet d’une éternelle ivresse,
Comme un monde d’amour, l’homme en ses bras le presse,
Et que reconnaissant ta tendre royauté,
Femme ! il adore en toi l’idéale beauté !…


II



La femme !… à ce nom seul tout notre être palpite,
Notre âme se dilate et le cœur bat plus vite…