Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/158

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Chappitre XLe
La IIIe faulte de Eve


La tierce folie de Eve fut qu’elle ne recorda pas à droit la deffense que Dieu avoit faicte à elle et à son seigneur ; ainçois y mist division. Car Dieu leur avoit dit que se ilz mangeoient de cellui fruit qu’ilz en mourroient, et pour ce, quant elle fist la responce au serpens, elle ne dist mie plainnement la verité, ainçois dist : « Se nous en mangions, nous en morrions par adventure. » Ainsi mist condicion en la response, si comme maintes folles femmes font quant l’on leur parle de folie. Mais Nostre Seigneur ne leur avoit pas mis de par aventure. Car la simple response de par aventure, que l’ennemi trouva en elle, lui donna pié de parler plus largement et de plus la tempter, tout aussy comme celles qui escoutent et respondent legièrement à ceulx qui les requièrent de fol amour. Car, par les simples responses et par l’escouter, ilz donnent voye et lieu de parler plus avant, ainsi comme il avint à Eve, nostre première mère, qui escouta l’ennemi jangler et respondit sans le conseil de son seigneur. Et pour ce l’ennemi la tempta et lui dist : « Vous en pourrez bien mangier, et si n’en mourrez mie, ains serez aussi beaulx comme Dieu et si sçaurez bien et mal. Et sçavez-vous pourquoy il a deffendu que vous ne mangiez point de ce fruit ? Pour