Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/186

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l’en que elles se cointièrent et s’enourguillèrent, et pour ce l’ennemi les tempta plus ligierement à faire celluy vil pechié, et dist l’en que l’une en atiza l’autre et ainsi l’autre le fist par mauvaiz conseil. Et pour ce je vouldroye que vous sceussiez l’exemple de la fole damoiselle, qui, pour un chapperon que un chevalier luy donna, elle fist tant et bargigna que sa dame fist sa volenté et que elle la fist deshonnourer ; dont il avint tel meschief que, au fort, un varlet que le seigneur avoit nourry s’en apperceust et le dist à son seigneur, et le seigneur s’en mist en espie, tant que il trouva le fait. Si occist le chevallier que il trouva avecques sa femme, et sa femme il mist en chartre perpetuelle, où elle mourut doulereusement. Sy advint que le seigneur passat devant la chartre où elle estoit ; si l’escouta et elle se doulousoit en soy et maudissoit qui lui avoit ce fait faire ne conseillié. Et alors il envoya sçavoir qui estoit celle qui le conseil luy avoit donné, et elle descouvry sa damoiselle. Et lors le chevalier la fist venir devant luy et luy commanda qu’elle deist verité, et au fort elle luy dist la verité et qu’elle en avoyt eu un chapperon, et le seigneur luy envoya querre le chapperon, et, quant il le vist, sy lui dist : « Ma damoiselle, mal le veistes ce chapperon et pour pou de chose vous estes deffaicte et avez esté cause de ma tristesse, et je juge que le col et le chapperon soit couppé tout ensemble. » Si luy fist vestir et coupper le col et le chapperon tout ensemble, et ainsy fut fait ce jugement. Sy regardez comment il fait bon prendre bonne compaignie et femmes de service nettes qui n’ayent eu nul blasme ; car ceste damoyselle n’avoit pas esté trop saige, comme