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rent le Rhin et ne voulurent plus s’en retourner. Devant la grandeur du péril suscité par leur faute, amèrement pleurée, les Celtes se réconcilièrent et proposèrent l’alliance aux Romains menacés comme eux par l’extension de la puissance germanique[1]. Mais l’inintelligence politique de César, secondée par sa perfidie, lui fit considérer dans l’alliance offerte un moyen de tromper les Celtes, de les prendre comme dans un rets et de les soumettre ; résultats : cinq siècles de domination romaine sur la Gaule, suivis de quatorze siècles de barbarie sur l’Europe. Car le flot Germanique s’étendit sur tout l’empire de Rome qui expia ainsi sa traitrise.

Les Celtes durent leurs défaites à leurs dissensions et à leurs fautes : aveu pénible et cependant rassurant pour l’avenir, puisqu’on est toujours libre de ne pas retomber dans ses erreurs. Mais malgré des revers purement accidentels, les Celtes possédaient sur leurs ennemis du Nord et du Midi une étonnante supériorité intellectuelle, ainsi que nous allons le démontrer.

Les Romains, peuple de brigands à l’origine, nuls dans toutes les manifestations de l’intelligence, étaient caractérisés en politique par l’instinct du groupement particulier aux bandits. Mais dans la conception étroite de la Cité romaine, les droits de l’individu furent brutalement sacrifiés aux intérêts de la masse. Autoritaire,absolutiste, la Cité dût le triomphe de sa politique à l’application constante de ce seul principe : diviser pour régner, en exerçant d’ailleurs une administration exploitatrice, avide et ruineuse.

En sociologie, les Celtes, au contraire, grâce à un vif sentiment d’individualité, avaient découvert de bonne heure le principe électif et le régime parlementaire[2], sûre garantie des droits individuels ; s’élevant au-dessus de la conception absolue et exclusive de la cité, ils s’étaient groupés en corps de nation, divisée en province, celles-ci en communes, avec des droits pour tous.

En portant la comparaison, non pas sur les peu inventifs Romains, mais sur les Grecs, leurs instructeurs, on apercevra mieux l’originalité des Celtes. Ceux-ci avaient mis, comme les Grecs, toute la

  1. Tout ce qui précède est expliqué au long, dans le premier livre des commentaires de César.
  2. Voyez pages 50 et 110 ; et Strabon.