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Page:London - Contes des mers du Sud, trad. Postif et Gruyer, 1948.djvu/107

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« Saxtorph tenta vainement, à grands coups de pied dans le derrière, de galvaniser son équipe d’éclopés. Les pauvres bougres tiraient de leur mieux sur les manœuvres, mais sans résultat appréciable.

« L’un d’eux, en halant, tomba soudain à la renverse. Il était claqué. Il fallait renoncer.

« Afin de déblayer le pont qui, inondé de sang, ressemblait à un étal de boucher, je décidai d’expédier à la mer morts et blessés. Et les requins, accourus pour dévorer les cadavres des chaloupes, continuèrent à faire bombance.

« Dans la cale, que nous explorâmes ensuite, Saxtorph et moi, nous dénichâmes cinq recrues, tremblantes comme la feuille et qui demeuraient cachées là. Elles allaient, à la bonne heure, nous constituer un équipage de fortune !

« Mais à peine les cinq noirs pourchassés par nous furent-ils remontés à l’air libre, qu’ils se hâtèrent de nous fausser compagnie et de piquer une tête dans l’élément liquide.

« À coups de revolver Saxtorph en tua deux, entre le ciel et l’eau. Et il aurait agi de même avec les trois autres, si je n’avais retenu son bras. J’étais écœuré de cet interminable massacre.

« Ma pitié fut d’ailleurs inutile et, suppléant aux alles de Saxtorph, les requins se régalèrent derechef des trois fuyards.

« Nous restâmes en panne, un mois durant, jusqu’à ce qu’un navire qui passait au large eut aperçu nos signaux et fût venu nous prendre en remorque pour nous conduire à Sydney.