Aller au contenu

Page:London - Contes des mers du Sud, trad. Postif et Gruyer, 1948.djvu/257

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

boyau, qui n’avait ni cocotiers, ni bananiers, mais qu’envahissait une végétation tropicale touffue, émergeant de toutes les crevasses du roc et faisant pendre, vers l’eau écumeuse, ses lourds festons.

À l’entrée de la gorge, la Rewa exécutait un bond de deux cent cinquante mètres d’un seul jet, et toute l’atmosphère vibrait de d’effroyable vacarme produit par cette chute.

John Starhurst s’avança donc vers le Bouli, chaussé des fameuses bottes d’où giclait, à chacun de ses pas, l’eau dont elles s’étaient remplies au passage du dernier gué de la Rewa.

« Je te salue, Ô Bouli, dit le missionnaire, et viens t’apporter des paroles amies.

— Très bien. Et qui envoie ?

— Dieu.

— C’est un nom nouveau pour moi, répondit le Bouli, en grimaçant un sourire. Jamais, à Viti-Levou, je ne l’ai entendu prononcer. De quelles îles, de quels villages et de quels détroits est-il le chef ?

— Il est le chef de toutes les îles qui existent sur la vaste mer, le chef de tous les détroits qui les séparent, de tous les villages qu’elles portent ! lança John Starhurst, avec solennité.

« Il est le Seigneur du ciel et de la terre, et c’est sa voix qui parle, par ma bouche.

— A-t-il, aussi, envoyé des dents de cachalot ?

— Nullement. Mais la foi que je t’apporte est plus précieuse, infiniment.

— C’est cependant, rétorqua le Bouli, la coutume entre chefs de s’envoyer, en signe d’amitié, quelques-unes de ces dents. De deux choses l’une,