— Oui, maître, et bien jouée !
Je protestai :
« Pourquoi, maintenant, me donnes-tu du maître ? Nous avons échangé nos noms. Pour toi je suis Oloo et, pour moi, tu es Charley. Toujours, tant que nous vivrons, il en sera ainsi, tu le sais comme moi,
« Oloo, quand nous serons morts, s’il advient que nous revivions quelque part, dans le ciel ou dans les étoiles, pour moi tu seras encore Charley, je serai encore Otoo pour toi.
— Oui, oui, maître ! s’écria le noir, les yeux radieux.
— Allons, voilà que tu recommences !
— Qu’importent les mots ! Si nos nouveaux noms ne sont pas encore sur mes lèvres, ils sont dans ma pensée, Et tout est là.
« Chaque fois que je penserai à moi-même, je penserai à toi. Lorsque les hommes m’appelleront par mon nom, c’est le tien que j’entendrai. Au ciel et dans les étoiles, pour toujours, toujours, tu seras pour moi Otoo.
« Maître, es-tu satisfait ? »
Tout ému, je répondis qu’en effet c’était bien.
Nous nous séparâmes à Papeete[1]. Je demeurai à Tahiti, afin de me reposer un peu de cette secouée, et Otoo partit sur un cotre pour Bora-Bora, son île natale.
- ↑ Principal port et capitale de Tahiti.